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Pologne : gays et lesbiennes catholiques s’affichent contre l’hostilité


L'affiche, visible un peu partout en Pologne, suscite de nombreux soutiens, mais aussi des commentaires violents de la part de l’Église. (Photo AFP)

L’affiche montre une poignée de mains entre deux personnes, l’une portant un bracelet arc-en-ciel, l’autre un rosaire : les LGBT catholiques polonais font campagne pour que l’Église s’ouvre à leurs problèmes malgré la vive hostilité des milieux conservateurs.

Accompagnée du slogan « Échangeons le signe de la paix », l’affiche a été tirée à 4 000 exemplaires. Elle est visible un peu partout en Pologne, suscitant de nombreux soutiens, mais aussi une douche froide des évêques. Un site web, znakpokoju.com, a été créé simultanément, où l’on peut visionner dix brèves vidéos où des croyants, lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres (LGBT), parlent de leur foi, et lire une déclaration exposant les objectifs de la démarche dans un pays où deux habitants sur trois sont des catholiques pratiquants.

Quatre publications catholiques du courant libéral de gauche, l’hebdomadaire Tygodnik Powszechny, les mensuels Znak et Wiez, et le trimestriel Kontakt, ont officiellement accordé leur appui à la campagne, financée par la fondation Soros. « Les LGBT veulent être dans l’Église, ils y cherchent leur place, alors qu’elle les exclut, pour elle ils sont invisibles », explique Misza Tomaszewski, journaliste de Kontakt engagé dans la campagne.

Pour Pawel Dobrowolski, l’un des trois militants à l’origine de l’initiative, le résultat de la campagne d’un mois qui s’achève début octobre a été « extraordinaire », tant en termes des citations dans les médias, que par l’écho suscité dans la société. « Toutes les grandes chaînes de télévision ont parlé de nous » et « après une émission sur une chaîne publique nous avons reçu des centaines de courriels, venant par exemple de parents d’enfants LGBT, qui disaient leur reconnaissance, avouant que jusque-là ils n’avaient pas osé aborder leur situation avec eux », raconte le jeune homme, directeur d’un festival de théâtre à Varsovie. « Des religieux, des prêtres, nous ont écrit pour dire qu’ils priaient pour nous et, à l’église où je vais à la messe, des gens m’ont salué amicalement. »

Commentaires violents en réaction

La hiérarchie de l’Église s’est montrée moins enthousiaste. La présidence de la conférence des évêques a publié un communiqué qui demandait aux fidèles de « ne pas participer à la campagne (…) car celle-ci dilue les exigences explicites de l’Évangile ». Le signe de la paix « exprime l’acceptation de la personne, mais jamais de son péché, quel qu’il soit », disent les évêques, et la campagne, « en sortant ce geste de son contexte liturgique, lui donne une signification incompatible avec l’enseignement du Christ et de l’Église ».

Pawel Dobrowolski préfère prendre les choses du bon côté, soulignant que les évêques invitent aussi les fidèles à offrir aux homosexuels « respect, ouverture et dialogue bien intentionné ». Les réactions hostiles, dit-il, ont été moins importantes que ce qu’il attendait, tant sur internet que dans les médias conservateurs. Il n’empêche que certaines ont atteint un degré d’agressivité surprenant. Un commentaire publié par l’hebdomadaire du diocèse de Katowice Gosc Niedzielny a été intitulé « L’union de promotion de la masturbation tend la main à l’Église », expliquant que l’initiative « Échangeons le signe de la paix » pouvait être comparée à un encouragement à l’onanisme. La campagne, ajoutait l’auteur, a pour but de « gagner l’acceptation sociale pour les comportements homosexuels » et l’image doit « montrer que le péché est partenaire de l’Église ». Un site conservateur catholique a lancé une pétition appelant les publications soutenant la campagne de « renoncer à l’homo-hérésie ». Mais son succès semble limité, avec seize mille clics d’approbation enregistrés en quinze jours. Un chiffre modeste dans un pays de 38 millions d’habitants, dont 89% se déclarent catholiques et 66% pratiquants.

Le Quotidien/AFP