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Pollution dans l’Arctique russe : le nettoyage prendra « des années »


21 000 tonnes de carburant que contenait le réservoir d'une centrale thermique se sont déversées dans l'Ambarnaïa et les terrains proches de cette rivière, teintant les cours d'eau en pourpre. (photo AFP)

Trois personnes ont été arrêtées mercredi pour leur rôle dans la pollution sans précédent de cours d’eau de l’Arctique russe, dont le nettoyage prendra « des années », à la suite d’une fuite de carburant contenu dans le réservoir d’une centrale thermique.

Présent dans cette région du grand-nord russe, le directeur général de Transneft Sibérie, Victor Bronnikov, chargé d’une partie des opérations de dépollution, a déclaré  que si la situation semblait « stabilisée », le pompage des polluants allait encore durer « au moins huit à dix jours ». Mais le « nettoyage complet va prendre des années », a-t-il prévenu, car des produits spéciaux vont être dispersés pour décomposer ou absorber le diesel n’ayant pu être pompé et qui s’est répandu dans cette zone marécageuse au printemps.

Sur le front judiciaire, le chef de l’entreprise chargé du réservoir de diesel qui a cédé le 29 mai, Pavel Smirnov, l’ingénieur principal Alexeï Stepanov et son adjoint Iouri Kouznetsov ont été arrêtés, a annoncé le comité d’enquête russe. Ces trois responsables de cette filiale du grand groupe minier russe Norilsk Nickel encourent jusqu’à cinq ans de prison. Ils sont accusés d’avoir continué à exploiter la citerne sans effectuer les réparations dont la nécessité avait été établie en 2018.

« Violation des règles de sécurité »

Le 29 mai, 21 000 tonnes de carburant que contenait le réservoir d’une centrale thermique se sont déversées dans l’Ambarnaïa et les terrains proches de cette rivière, teintant les cours d’eau en pourpre. Le président russe Vladimir Poutine a alors décrété l’état d’urgence et sermonné l’oligarque Vladimir Potanine, le patron de Norilsk Nickel. « Le réservoir (…) a continué à être utilisé en violation des règles de sécurité. En conséquence, un accident s’est produit », souligne le comité d’enquête, qui doit désormais décider s’il maintiendra les trois suspects en détention provisoire pour une durée prolongée.

Norilsk Nickel a condamné l’arrestation de ces responsables, jugée « déraisonnablement sévère ». « Les dirigeants des centrales coopèrent avec les forces de l’ordre et ils seraient beaucoup plus utiles sur les lieux » de l’accident, a déclaré Nikolaï Outkine, le vice-président de Norilsk Nickel. Mardi, le gouverneur du territoire concerné a affirmé que la pollution avait atteint le lac de Piassino, à partir de l’Ambarnaïa, et évoqué la possibilité qu’elle se propage jusqu’à la mer arctique de Kara.

Aucune chance pour les animaux

Norilsk Nickel a pour sa part démenti la pollution de ce lac. L’entreprise estime que l’accident a probablement été provoqué par le dégel du permafrost, conséquence du réchauffement climatique, qui aurait entraîné l’effondrement des piliers soutenant la citerne. Sa fonte sous les effets du réchauffement de la planète est considérée en Russie comme un défi majeur car elle fragilise toutes les villes et les infrastructures, notamment minières, gazières et pétrolières, bâties dessus depuis des décennies. Norilsk Nickel a reconnu que l’état du permafrost n’était pas surveillé jusqu’ici, annonçant un audit complet de ses infrastructures.

Sur place, les travaux de nettoyage mobilisent près de 700 personnes, a relevé le ministère des Situations d’urgence. Selon le directeur général de Transneft Sibérie, les premiers effets sur l’écosystème de cette région peu peuplée ont déjà pu être constatés. « Nos travailleurs ont vu des canards morts. J’ai moi-même vu un rat musqué mort », a-t-il affirmé, notant que tout animal entré en contact avec du carburant était « définitivement condamné à mort ». Il a néanmoins assuré qu’il n’y avait pas de « morts en masse d’animaux ».

LQ/AFP