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Plan pour relancer l’Europe : de nombreux obstacles à surmonter


Le ministre allemand des Finances, Olaf Scholz, a clairement dit que 500 milliards d'euros de relance, ça suffisait (Photo : AFP).

Face à la menace d’une récession historique dans l’UE, Bruxelles propose un plan de relance sans précédent qui sera débattu pour la première fois vendredi par les 27 dirigeants européens. Emprunt commun, nouveaux impôts, dons ou prêts, conditions.

Revue de détail des sujets qui fâchent : Il y a un peu moins de trois semaines, la Commission européenne a proposé un plan de 750 milliards d’euros. C’est davantage que ce qu’avaient imaginé la France et l’Allemagne qui proposaient 500 milliards d’euros. Plusieurs pays du Nord s’interrogent sur le montant proposé par Bruxelles jugé trop élevé: les « quatre frugaux » – Pays-Bas, Danemark, Suède et Autriche -, mais aussi l’Allemagne. Le ministre allemand des Finances, Olaf Scholz, a clairement dit que 500 milliards suffisaient. C’est la grande nouveauté du plan: la Commission européenne propose d’emprunter sur les marchés 750 milliards d’euros. Jamais elle n’a levé une telle somme au nom des 27. Grâce à sa bonne image auprès des investisseurs, mis en confiance par l’orthodoxie budgétaire de pays comme l’Allemagne ou les Pays-Bas, Bruxelles bénéficie de taux d’intérêt peu élevés. Une aubaine pour les pays du Sud comme l’Italie dont la dette publique explose. Cette mini-révolution a été rendue possible grâce à la volte-face de Berlin qui, face à l’ampleur de la crise, a accepté aux côtés de Paris l’idée d’une mutualisation des dettes entre Etats membres.

Dans la proposition de Bruxelles, le paiement des intérêts commencerait dès 2021, mais le remboursement des sommes empruntées n’aurait lieu qu’à partir de 2028 et s’étalerait jusqu’en 2058. Berlin plaide pour qu’il commence dès 2027. Pour rembourser ce grand emprunt, deux solutions: soit demander aux 27 de l’Union d’augmenter leur contribution au budget européen, soit trouver de nouvelles ressources. Bruxelles plaide pour la deuxième option en créant de nouvelles taxes. Un argument de poids pour tous les pays qui payent davantage qu’ils ne reçoivent des caisses européennes, et notamment pour les « quatre frugaux » qui refusent d’augmenter leur écot. Parmi les impôts proposés par la Commission: un « mécanisme d’ajustement carbone aux frontières » pour faire payer les biens importés dont le processus de fabrication est très polluant, un impôt sur les activités des grandes entreprises, voire une taxe sur les grandes sociétés du secteur numérique. Or, difficulté notable, la création d’impôts européens exige l’unanimité des Etats membres. Sur les 750 milliards d’euros du plan de relance, la Commission propose de verser 500 milliards sous forme de subventions – qui ne doivent pas être remboursés par les bénéficiaires – et 250 milliards sous forme de prêts. Mais les « frugaux » rejettent l’idée de dons et ne veulent que des crédits. Ces quatre pays, qui – comme l’Allemagne, la France et l’Italie – payent davantage qu’ils ne reçoivent du budget européen sont inquiets. Car en cas de désaccord sur la création de nouvelles ressources, ce sera aux pays les plus riches de mettre la main à la poche. Dans le plan présenté par Bruxelles, l’Italie et l’Espagne pourraient se tailler la part du lion avec plus de 172 et 140 milliards d’euros respectivement (répartis entre subventions et prêts).

« Visegrad » veut sa part du gâteau

Très endeuillés par la pandémie de coronavirus, ces pays ont des économies dépendant largement du tourisme, mises à mal par les mesures de confinement. Les quatre pays d’Europe centrale, dits du groupe de Visegrad (Pologne, République tchèque, Hongrie et Slovaquie) ont récemment appelé à une répartition « équitable » du plan. Si la Pologne est, selon le projet de la Commission, le troisième bénéficiaire avec 63,838 milliards d’euros, ces voisins sont bien moins lotis et craignent d’être sacrifiés au profit du Sud. Bruxelles propose que les pays bénéficiaires d’une aide présentent un plan d’investissements et de réformes, compatibles avec les priorités de l’UE, c’est-à-dire la transition écologique et numérique ainsi qu’une économie plus résistante. Les pays du Nord, comme les Pays-Bas, insistent sur l’importance de réformes qui permettraient d’assainir les finances publiques. De leur côté, les Pays du Sud, comme l’Italie, rejettent toute idée d’un contrôle trop sévère de leur politique qui reviendrait à une mise sous tutelle, comme l’avait vécu la Grèce au moment de la crise de la zone euro.

AFP