Après la mort de trois migrants fauchés par un train en 2021 à Ciboure (Pyrénées-Atlantiques), un survivant et des proches viennent de saisir la justice pour dénoncer « le verrouillage des frontières », a-t-on appris vendredi auprès de leur avocat.
Le 12 octobre 2021 vers 05h, quatre Algériens avaient été happés par un TER alors qu’ils longeaient la voie ferrée à pied afin d’échapper à d’éventuels contrôles de police, plusieurs kilomètres après avoir franchi la frontière franco-espagnole. Trois d’entre eux décédaient sur le coup, le quatrième étant grièvement blessé.
Une première plainte, visant un passeur qui aurait drogué les victimes, avait été classée sans suite l’an dernier, faute d’analyses toxicologiques probantes. Au moment du drame, les victimes s’étaient allongées pour se reposer de leur marche nocturne et n’auraient pas entendu le train arriver.
Le survivant, les familles des victimes et des associations ont cette fois déposé une plainte avec constitution de partie civile auprès d’un juge d’instruction du tribunal de Bayonne pour dénoncer « le verrouillage des frontières qui fait prendre des risques inconsidérés aux exilés », a précisé Me Gabriel Lassort.
Cette plainte met en cause le « rétablissement irrégulier des contrôles aux frontières intérieures de la France » et l’action des forces de l’ordre qui « ne peuvent ignorer qu’en renforçant sans cesse les obstacles physiques à la circulation des personnes (…) elles contribuent directement, mécaniquement, à la multiplication d’accidents graves et de décès.
Pour l’avocat, le drame de Ciboure découle directement de cette politique : « Les exilés prennent des risques absolus pour tenter de passer. Pour preuve, la veille, deux des victimes avaient déjà tenté leur chance autrement et s’étaient fait refouler. »
Au Pays basque, trois points de passage frontaliers sont fermés depuis 2021, dont un pont piétonnier d’Hendaye, pour « lutter contre l’immigration clandestine et la menace terroriste ». Les associations d’aide aux migrants s’insurgent de cette « omniprésence policière ».
Dans un rapport publié en mai, plusieurs ONG, dont Amnesty International et Médecins du Monde, recensent « au moins 12 » décès en 2021 et 2022 dans la zone, dont cinq migrants noyés après avoir tenté de franchir la Bidassoa, fleuve frontalier du Pays basque.