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Nombre record de jihadistes dans les prisons européennes


La France est en première ligne avec à elle seule un tiers des détenus (549 sur un total de 1 405), devant l'Espagne, la Grande-Bretagne et la Belgique. (illustration AFP)

Jamais les prisons européennes n’ont compté autant de détenus liés à des affaires de terrorisme, selon une étude portant sur dix pays, qui insiste sur la gestion de la détention comme outil prioritaire de la lutte antiterroriste.

Selon ce travail du Centre international d’étude de la radicalisation (ICSR), au King’s College de Londres, auquel ont contribué des experts respectés du sujet, « il y a plus de détenus condamnés pour des infractions liés au terrorisme qu’à aucun moment depuis le tournant du millénaire ». Cette population est hétérogène, avec en particulier une importante féminisation et une montée en nombre des militants d’extrême droite, précise cette analyse publiée cette semaine, qui en prolonge une semblable effectuée en 2010 par l’ICSR.

La France est en première ligne avec à elle seule un tiers des détenus (549 sur un total de 1 405), devant l’Espagne (329), la Grande-Bretagne (238) et la Belgique (136). Les autres pays connaissent des populations à deux chiffres (Suède, Pays-Bas, Norvège, Danemark) ou n’ont pas de statistiques adaptées (Allemagne et Grèce). Les dix pays admettent la difficulté de savoir vraiment ce qui se passe dans l’intimité des prisons. « Des outils d’évaluation du risque spécifiques à l’extrémisme sont désormais utilisés dans la majorité des pays étudiés », constate le rapport, relevant cependant que certains dispositifs sont trop récents pour être évalués. Et que le combat est compliqué face au mensonge de la part des jihadistes qui ont appris à déjouer les entretiens.

Rien ne peut remplacer la surveillance humaine

Faut-il regrouper les détenus ? Les répartir dans la population carcérale globale ? Les isoler ? Chaque solution a ses défenseurs mais les dispositifs mixtes se multiplient, indiquent les chercheurs, avec une attention particulière portée aux plus dangereux (regroupés ou séparés selon les pays), quand les détenus de moindre importance sont dispersés. Tous les pays reconnaissent à cet égard « que le désengagement prend du temps et ne sera pas toujours un succès ».

Le rôle de la prison comme incubateur de radicalisation n’est pas nouveau. Il y a plusieurs décennies, les islamistes égyptiens, l’extrême droite allemande ou les indépendantistes irlandais avaient eux-mêmes compris l’intérêt de la prison pour renforcer leurs mouvements respectifs. « Bien avant que la direction de Daech n’émerge du Camp Bucca, en Irak, les prisons ont été le centre de gravité de virtuellement tous les groupes terroristes de l’ère moderne », rappelle le rapport. Il formule un certain nombre de recommandations, faisant de la prison une priorité de tout premier ordre. « Conscients que dépenser de l’argent dans la prison est impopulaire », les auteurs appellent chancelleries et opinions publiques à « comprendre que le maintien de l’ordre et de la sûreté en prison constituent des investissements clés pour lutter contre le crime et le terrorisme ». « Aucun logiciel performant ni outil d’évaluation ne peuvent compenser l’absence de personnel suffisant, d’espace et de ressources fondamentales ».

LQ/AFP