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Michael Cohen, le confident de Donald Trump devenu balance


L'ancien avocat de Donald Trump Michael Cohen avant son audition devant le Congrès américain, mercredi à Washington. (photo AFP)

Il était l’avocat personnel et l’incarnation de la loyauté à Donald Trump, prêt à « prendre une balle » pour son patron. Depuis six mois, Michael Cohen est devenu le plus redouté des témoins à charge pour le président américain, et une cible privilégiée pour la Maison-Blanche et ses partisans.

« Escroc », « menteur », « raciste » : grâce à un texte diffusé à l’avance, on sait que Michael Cohen, 52 ans, entend détailler devant le Congrès américain et des millions de téléspectateurs les aspects les plus répréhensibles de son ancien patron : des paiements pour acheter le silence de deux ex-maîtresses aux coulisses de la Trump Organization, en passant par de présumés mensonges du milliardaire sur ses déclarations d’impôts.

Car depuis août dernier, Michael Cohen a enterré l’homme de confiance qu’il fut pendant 10 ans pour Donald Trump et sa famille. Interrogé des heures durant par les enquêteurs, cet homme pâle aux cheveux grisonnants a reconnu avoir longtemps menti pour « couvrir les sales coups » du milliardaire. Mais assure désormais « dire la vérité », dans l’intérêt de sa famille et du pays.

Lui qui a connu Donald Trump après avoir acheté des appartements dans ses immeubles avait pourtant gagné sa confiance grâce à une fidélité irréprochable. Fan du magnat depuis l’adolescence, ayant lu deux fois son best-seller The Art of the Deal, il avait été propulsé, aux côtés des enfants Trump, vice-président de la Trump Organization.

Moyennant 500000 dollars de salaire annuel, cet amateur de belles voitures se chargeait des sales besognes. Comme menacer les journalistes qui s’intéressaient aux côtés sombres du milliardaire devenu vedette de téléréalité.

« Pitbull » 

« Si quelqu’un fait quelque chose qui ne plaît pas à Trump », disait-il en 2011 à la télévision, « je vais vous attraper, vous saisir au collet, et je ne vous lâcherai plus tant que je n’aurai pas fini ». Ce dévouement vaudra à Michael Cohen le sobriquet de « pitbull » de Donald Trump, l’entraînant du mauvais côté de la loi.

D’autant que ce fils d’une infirmière et d’un médecin d’origine polonaise rescapé de l’Holocauste, originaire, comme son ancien patron, du quartier new-yorkais du Queens, fricotait déjà avec les affaires louches. Au sortir de la faculté de droit de Lansing (Michigan), une des moins cotées du pays, il rejoint les avocats « chasseurs d’ambulance », prompts à proposer leurs services aux accidentés. Il défendra ainsi une femme impliquée dans une arnaque à l’assurance fondée sur un faux accident de la route.

Avec son épouse d’origine ukrainienne, il investit dans des licences de taxi, à New York et à Chicago, à l’ère « pré-Uber » où leur valeur grimpait et où le milieu des taxis jaunes sentait la mafia. Il avouera avoir dissimulé au fisc quelque 4 millions de dollars liés aux taxis.

Au service de Donald Trump, il intervient pour faire taire deux femmes, l’actrice de films X Stormy Daniels et l’ex-Playmate Karen McDougal, qui menaçaient, pendant la campagne présidentielle 2016, de révéler leur liaison supposée avec le milliardaire.

Mais après la perquisition de ses bureaux et de son domicile en avril dernier, ce père de deux enfants étudiants, déçu de ne pas avoir rejoint la Maison-Blanche et confronté à des frais d’avocats colossaux que personne dans l’entourage de Donald Trump ne lui propose de payer, amorce son retournement.

Aveux compromettants 

En août, il avoue avoir payé 280000 dollars aux deux femmes pour leur silence, en violation des lois sur le financement des campagnes électorales, qui interdisent à un individu de contribuer à plus de 2700 dollars à une campagne. Surtout, il affirme avoir fait ces paiements « à la demande » du président.

Michael Cohen devient aussi témoin-clé dans l’enquête du procureur spécial Robert Mueller sur une éventuelle collusion entre l’équipe Trump et la Russie pendant la campagne présidentielle de 2016. Il reconnaît en novembre que ses contacts avec Moscou pour promouvoir un projet de « Tour Trump » se sont poursuivis très tard dans la campagne, contrairement à ce qu’il avait affirmé au Congrès.

Ces aveux ont touché au cœur le président américain, alimentant les scénarios d’une destitution ou d’une inculpation en cas de non réélection en 2020. Ils ont valu à Michael Cohen une peine de trois ans de prison, et de multiples attaques du président et de ses partisans.

Donald Trump le traite de « menteur », de « rat », et a insinué, d’un tweet, que sa femme et son beau-père pourraient avoir eux aussi commis des délits. Invoquant des menaces contre sa famille, Michael Cohen a été contraint de reporter son audition devant le Congrès.

Des menaces de révélations extra-conjugales lancées mardi par un parlementaire républicain de Floride ont confirmé que les partisans du président ne lui feraient aucun cadeau pour son audition. Reste que Michael Cohen, désormais rayé du barreau new-yorkais, a intérêt à lâcher tout ce qu’il peut avant son incarcération le 6 mai : tout nouvel élément utile aux enquêteurs pourrait encore lui valoir une réduction de peine.

AFP