La chancelière allemande Angela Merkel est attendue dimanche en Turquie pour négocier un plan afin d’endiguer le flot de migrants vers l’UE, au moment où son pays est sous le choc après l’attaque contre une femme politique œuvrant à l’accueil des réfugiés.
La dirigeante allemande qui doit rencontrer le président Recep Tayyip Erdogan et le Premier ministre Ahmet Davutoglu est attendue à Istanbul en début d’après-midi.
Sujet principal au menu : le «plan d’action» annoncé jeudi par l’Union européenne pour amener Ankara à agir pour tarir le flux de migrants, notamment ceux fuyant la guerre en Syrie, en les gardant sur son territoire.
Mais la Turquie, qui accueille déjà plus de deux millions de réfugiés, fait monter les enchères, qualifiant ce plan de simple «projet» au budget «inacceptable», et estimant avoir besoin d’au moins trois milliards d’euros pour la première année.
L’UE veut qu’Ankara accueille davantage de réfugiés et renforce la surveillance des frontières en échange de moyens, de la relance des discussions sur sa candidature à l’UE et d’un accès facilité aux visas.
«Si l’Allemagne et la Turquie ne parviennent pas à un accord, aucune autre solution n’est en vue et la migration de masse de Syriens et d’autres vers l’UE va continuer», relève le centre d’analyse European Stability Initiative dans une note consacrée à la visite de Mme Merkel.
Des milliers de migrants en Slovénie
L’UE a vu arriver depuis le début de l’année des centaines de milliers de migrants, la plupart visant de s’établir en Allemagne et en Europe du nord. Et les capitales européennes se sont montrées jusqu’ici incapables de trouver des solutions concertées pour gérer les flux migratoires.
Depuis samedi, c’est via la Slovénie que les migrants prennent la route de l’Autriche et de l’Allemagne par milliers, la Hongrie ayant fermé sa frontière avec la Croatie. Un milliers d’Afghans de Syriens et d’Irakiens notamment ont déjà été pris en charge dans la journée de samedi et dans la nuit par les autorités autrichiennes à partir du poste frontière de Spielfed.
Un train avec à son bord plus de 1 000 migrants attendait dimanche dans le nord de la Croatie de se diriger vers la Slovénie alors que 3.000 autres avaient franchi samedi la frontière. En Allemagne, la chancelière Merkel est elle en difficulté, sa politique de la porte ouverte aux migrants depuis l’été étant toujours plus critiquée, en particulier dans son propre camp conservateur.
Le débat a pris une direction autrement plus dramatique samedi avec l’agression au couteau de la candidate à la mairie de Cologne Henriette Reker, une indépendante soutenue par la CDU d’Angela Merkel. Gravement touchée au cou, ses jours ne sont cependant pas en danger.
Selon la police, cette attaque «politique» a été commise par un individu qui a reconnu ses motivations «racistes» contre une femme chargée à la mairie de l’accueil des réfugiés. La victime est l’une des deux favoris du scrutin de dimanche qui a été maintenu. De premiers résultats doivent être connus vers 18H00 GMT.
Radicalisation en Allemagne
Le fait que le suspect ait été proche des milieux d’extrême droite dans les années 1990 selon la presse semble conforter les craintes des autorités qui depuis plusieurs semaines évoquaient le risque d’un «terrorisme d’extrême droite» en raison de l’afflux de réfugiés.
Le discours de la mouvance populiste n’a eu cesse de se radicaliser à mesure que les réfugiés arrivaient en Allemagne où de 800.000 à un million de demandeurs d’asile sont attendus cette année. Lundi, pour son premier anniversaire, le mouvement islamophobe Pegida, qui a pris Mme Merkel comme cible numéro un, prévoit ainsi une grande marche dans son fief de Dresde.
La classe politique a dès lors mis la lutte contre l’extrême-droite, responsable aussi de dizaines d’attaques depuis le début de l’année contre des foyers de réfugiés, en tête des priorités.
«Peut-être que nous allons tirer comme leçon (de l’agression) qu’il faut agir de manière déterminée contre les semeurs de peur et les démagogues de droite», a souligné Aydan Özoguz, la chargée de l’intégration auprès du gouvernement allemand.
«Nous devons à chaque instant nous démarquer de toute former de racisme et de violence», a aussi déclaré Peter Altmeier, le directeur de cabinet de la chancelière et coordinateur de la politique allemande concernant la crise migratoire.
Mais des voix plus nombreuses s’élèvent aussi pour fermer les frontières, une mesure que Mme Merkel a rejetée à plusieurs reprises en la qualifiant de «fausse solution».
AFP/M.R.