L’ancien chef du gouvernement espagnol a accusé mercredi les indépendantistes catalans d’avoir voulu « liquider la souveraineté nationale » en organisant en 2017 un référendum interdit par la justice lors de son audition très attendue au procès des ex-dirigeants séparatistes.
« Ils étaient pleinement conscients que (…) tant que Mariano Rajoy serait président du gouvernement, il n’y aurait pas de référendum pour liquider la souveraineté nationale », a-t-il immédiatement déclaré d’un ton offensif, assis sur un fauteuil en contrebas des sept juges, avec une partie des accusés derrière lui. « Il n’y a eu aucun référendum », a soutenu Mariano Rajoy, qui était au pouvoir au moment de la tentative de sécession.
Malgré l’interdiction de la justice espagnole, le gouvernement régional catalan a organisé le 1er octobre 2017 un vote sur l’autodétermination de la région. Selon les autorités régionales, plus de 90% des 2,3 millions d’électeurs catalans y ayant participé ont voté en faveur de l’indépendance, un résultat invérifiable.
Cité à comparaître par le parti d’extrême droite Vox
Rajoy est cité à comparaître dans ce procès par le petit parti d’extrême droite Vox qui a exploité la crise catalane pour prospérer et joue un rôle d' »accusation populaire » controversé, en raison d’une singularité pénale espagnole.
Dans la matinée, l’ancien bras droit de Mariano Rajoy, Soraya Saenz de Santamaria, a déjà farouchement défendu l’action du gouvernement en 2017. Haussant soudain la voix, l’ancienne vice-présidente a soutenu devant les juges que « chacun peut avoir ses opinions et les exprimer » mais « ce qu’on ne peut pas faire c’est enfreindre la loi et des décisions judiciaires et générer des épisodes violents ».
Admettant que les images de violences policières du 1er octobre 2017 n’étaient « pas agréables à voir », elle a rejeté leur responsabilité sur les électeurs indépendantistes. S’ils n’avaient pas été appelés à former des « murs humains » pour empêcher la saisie des urnes, « peut-être que certaines images ne se seraient pas produites », a-t-elle dit.
«Je m’étais trompé en pensant que le gouvernement central n’enverrait jamais des forces de l’ordre»
Auparavant, l’ancien président de la Catalogne de 2010 à 2016, Artur Mas – également témoin au procès – a au contraire fait valoir que le mouvement indépendantiste avait toujours agi avec « la volonté d’éviter la moindre violence ». « Je m’étais trompé en pensant que le gouvernement central n’enverrait jamais des forces de l’ordre pour intervenir » le jour du référendum, a-t-il dit, en critiquant « une chose aussi peu intelligente qui pouvait saper son image et faire le tour du monde ».
Mariano Rajoy a dirigé l’Espagne de 2011 jusqu’au renversement de son gouvernement en juin 2018. Il avait alors été coulé par un méga procès pour corruption ayant affecté son parti et entraîné le vote d’une motion de censure qui a permis au socialiste Pedro Sanchez d’accéder au pouvoir. Aussitôt après la déclaration d’indépendance votée par le Parlement catalan le 27 octobre 2017, il avait placé la région sous tutelle, destitué le gouvernement de Carles Puigdemont et dissous le Parlement régional. En décembre 2017, cependant, les élections régionales convoquées par Madrid avaient été de nouveau remportées par les indépendantistes.
Mariano Rajoy a abandonné la politique en juin.
AFP