Le Premier ministre malaisien Muhyiddin Yassin et son gouvernement ont démissionné lundi après 17 mois au pouvoir ouvrant une nouvelle période d’instabilité politique pour ce pays d’Asie du Sud-Est aux prises avec une flambée du Covid-19.
« Le gouvernement a remis sa démission au roi », a indiqué le ministre de la Science Khairy Jamaluddin sur son compte Instagram. Le Premier ministre était arrivé au pouvoir en mars 2020 sans élection et dirigeait un gouvernement de coalition depuis la chute du gouvernement réformiste de Mahathir Mohamad, vétéran de la politique malaisienne.
La tenue de nouvelles élections est peu probable à court terme à cause de la situation sanitaire, et les observateurs s’attendent à une période de marchandage intense pour parvenir à une nouvelle coalition viable.
Le Premier ministre sortant a attaqué ses adversaires au sein de sa propre coalition dans un discours lundi. « J’aurais pu emprunter la voie la plus facile en passant outre mes principes pour rester Premier ministre, mais ce n’a pas été mon choix », a-t-il déclaré à la télévision. « Je ne travaillerai jamais avec des kleptocrates ».
Le Premier ministre a affirmé que plusieurs députés qui lui avaient retiré leur soutien, dont l’ex-dirigeant Najib Razak impliqué dans le vaste scandale de corruption 1MDB, l’ont sanctionné pour avoir refusé de faire annuler les poursuites à leur encontre. Muhyiddin Yassin était aussi vivement critiqué par l’opposition pour avoir imposé en janvier un état d’urgence dû à l’épidémie qui a suspendu le parlement et lui a permis d’échapper ainsi à des élections.
Pas de successeur évident
Le Premier ministre de 74 ans avait essayé encore vendredi de s’accrocher au pouvoir en proposant sans succès aux élus de l’opposition de le soutenir en échange de l’adoption de plusieurs réformes. Mais après avoir échoué à obtenir le soutien des parlementaires, il a offert sa démission au monarque malaisien.
Le palais a confirmé dans un communiqué que le roi avait formellement accepté la démission de M. Muhyiddin et précisé qu’il servirait de Premier ministre par intérim avant son remplacement. Sans successeur évident, le pays pourrait replonger dans une nouvelle période d’instabilité politique, telles que celles que le pays a déjà traversé à plusieurs reprises sur fond de lutte entre factions rivales.
Depuis son indépendance de la Grande-Bretagne en 1957, la Malaisie a été dirigée pendant six décennies par l’UMNO, un parti dominé par les Malais, ethnie majoritaire dans le pays qui compte aussi d’importantes minorités chinoise ou indienne.
Mais des scandales de corruption retentissants, une politique discriminatoire en faveur des Malais et un tournant autoritaire lui a fait perdre les élections en 2018.
La victoire de l’opposition et l’arrivée du réformiste Mahathir Mohammad a déclenché des espoirs de changement mais son gouvernement est tombé à cause de rivalités entre ses leaders, permettant le retour au pouvoir de l’UMNO dans un gouvernement de coalition mené par M. Muhyiddin.
La légitimité de Muhyiddin Yassin, arrivé au pouvoir sans élections, a été néanmoins critiqué ainsi que son échec à maîtriser la propagation du Covid-19. Le pays de 32 millions d’habitants traverse une forte vague de contaminations, avec plusieurs dizaines de milliers de nouveaux cas chaque jour, et son économie a été mise à mal par les confinements et restrictions imposées par le gouvernement.
LQ/AFP