L’UE, en pointe des négociations sur la lutte contre le réchauffement climatique en décembre à Paris, accélère désormais son processus de ratification de crainte de rester sur la touche.
« Tous les membres de l’Union européenne sont désormais prêts à ratifier le plus vite possible », et « nous ne serons pas les derniers à ratifier », a assuré vendredi à Bratislava le président français François Hollande, après un sommet à 27 sur l’avenir de l’UE.
Début septembre, peu avant le sommet du G20 en Chine, les deux principaux pollueurs de la planète, Chinois et Américains, avaient présenté leur ratification au secrétaire général de l’ONU Ban-Ki moon, sous les yeux des Européens désormais sous pression.
« Il faut absolument que l’Europe reste dans une position de leadership. Or il y a un risque lié à nos procédures internes que nous ne soyons pas présents avec les premiers participants », s’inquiète une source diplomatique européenne.
Pour entrer en vigueur, l’accord mondial sur le climat, qui ambitionne de contenir le réchauffement climatique sous le seuil de 2°C par rapport au niveau pré-industriel, nécessite deux conditions: être ratifié par 55 pays, qui doivent totaliser 55% des émissions de gaz à effet de serre.
L’initiative de Pékin et Washington a considérablement fait avancer les choses. Selon le site de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (UNFCCC), au 15 septembre 27 Etats avaient ratifié l’accord, représentant 39% des émissions.
L’UE a déposé ses engagements de réduction des émissions auprès des Nations unies comme entité unique, souligne une source à la Commission européenne. Rien ne s’oppose donc à une ratification désynchronisée, en amont des Etats membres, selon elle.
La ratification de l’UE, qui représente un peu plus de 12% des émissions mondiales, scellerait quasiment la ratification de l’accord.
« Pourtant, l’Europe peine aujourd’hui à montrer la voie et à faire partie des premiers à ratifier », s’est ému le président de la Commission Jean-Claude Juncker cette semaine. Un nouvel exemple, selon lui, de la difficulté des Européens à « tenir les promesses », qui participe à « saper la crédibilité de l’Union ».
Pour l’UE, ratifier un tel accord international suppose de le faire en tant qu’Union, mais aussi au sein de chaque Etat membre, ce qui peut prendre du temps selon la voie législative empruntée.
Echéances cruciales
A ce jour, seules la France, la Hongrie et l’Autriche ont finalisé la procédure.
« L’UE prend en compte deux considérations politiques: sa contribution à la dynamique politique qui pousse à la ratification de l’accord de Paris d’une part, et d’autre part, d’un côté pratique, elle veut s’assurer d’avoir une place à la table où seront prises les décisions », explique Josh Roberts, de l’ONG juridique ClientEarth.
Car des échéances décisives approchent. La prochaine conférence mondiale sur le climat, dite COP 22, prévue du 7 au 18 novembre à Marrakech (Maroc), se concentrera sur la mise en oeuvre de l’accord de Paris.
Or, pour pouvoir participer aux prises de décisions, l’UE doit avoir présenté sa ratification environ un mois à l’avance. Elle s’interroge donc pour savoir comment présenter d’ici là au moins une ratification en son nom, en attendant ultérieurement le ralliement des Etats membres, selon des sources concordantes.
La ministre française de l’Environnement et présidente de la COP21, Ségolène Royal, avait pris acte le 7 septembre des avancées dans la ratification européenne, affirmant que plus aucun pays ne conditionnait la ratification au niveau de l’UE au partage des efforts de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030.
Pour Wendel Trio, directeur de l’ONG Climate Action Network Europe, il s’agissait là d’un frein pour certains Etats membres, car si les objectifs globaux de l’UE sont déjà fixés (au moins 40% de réduction par rapport aux niveaux de 1990), la répartition par pays est actuellement en discussion, sur la base d’une proposition de la Commission faite en juillet.
« Ce que je comprends, c’est que tous les pays n’ont pas encore donné leur accord mais qu’il est très probable qu’ils le feront sous la pression des gros Etats », explique M. Trio.
L’accord du Conseil est désormais attendu lors d’un conseil extraordinaire des ministres de l’Environnement des 28 le 30 septembre, avant qu’un vote du Parlement attendu début octobre n’officialise les choses.
Le Quotidien / AFP