Des enquêteurs de l’ONU ont appelé jeudi les pays à rapatrier les enfants de jihadistes étrangers du groupe État islamique (EI) qui se trouvent en Syrie, y compris avec leurs mères.
Dans un rapport publié jeudi, la Commission d’enquête indépendante et internationale (COI) sur la Syrie, créée en 2011 par le Conseil des droits de l’Homme de l’ONU, explique que nombre de ces enfants se trouvent en situation « particulièrement précaire » car ils ne disposent pas de document d’identité. Nés dans des zones anciennement contrôlées par l’opposition syrienne, ces enfants peinent à obtenir leur enregistrement à l’état civil « car les documents fournis par les groupes armés ne sont pas reconnus par les autorités gouvernementales compétentes », détaille le rapport.
Les enquêteurs demandent aux pays d’origine des combattants étrangers de prendre « immédiatement des mesures pour simplifier l’enregistrement de leurs ressortissants nés en Syrie, dans le but ultime de les rapatrier dès que possible, ainsi que les personnes qui s’occupent d’eux ».
Depuis la chute en mars du « califat » de l’EI proclamé en 2014, la communauté internationale est confrontée au casse-tête du rapatriement des familles des jihadistes capturés ou tués en Syrie et en Irak. Les retours dans les pays occidentaux comme l’Autriche, l’Allemagne ou la France ont lieu au compte-gouttes. La COI appelle les États à donner « la priorité au rapatriement des enfants non accompagnés ».
Protéger les enfants apatrides
« Les États ont des obligations bien définies de protéger les enfants, y compris contre l’apatridie. Ne pas respecter ces principes fondamentaux constituerait une dérogation claire à cette obligation », a noté Hanny Megally, membre de la COI, dans un communiqué.
Lorsqu’elles sont présentes, « les mères devraient être rapatriées avec leurs enfants pour garantir le respect du principe de l’intérêt supérieur de l’enfant », souligne le rapport, qui demande aussi aux pays d’origine de ne pas priver les parents de leur nationalité. Début novembre, une responsable du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’Homme, Marie-Dominique Parent, avait chiffré à entre 700 et 750 le nombre d’enfants nés de parents ressortissants de l’UE qui sont retenus dans des conditions précaires dans des camps du nord-est de la Syrie.
Au total, quelque 12 000 étrangers, 4 000 femmes et 8 000 enfants, sont installés dans trois camps de déplacés du nord-est, la grande majorité dans celui d’Al-Hol, selon des statistiques des autorités kurdes. Les plus de douze ans se retrouvent dans des centres de détention, aux côtés des adultes, a expliqué aux journalistes Hanny Megally, précisant que ces centres regroupent environ 11 000 personnes. « Les États qui ont des ressortissants dans ces centres de détention savent ce qui se passe à l’intérieur », a déclaré le président de la COI, Paulo Pinheiro, jugeant « scandaleux » que les pays ne fassent pas sortir plus rapidement les enfants de ces « prisons ».
Le conflit en Syrie, déclenché en mars 2011 avec la répression de manifestations prodémocratie par Damas, a fait plus de 380 000 morts dont plus de 115 000 civils, et des millions de déplacés et réfugiés. La COI a dénoncé à de multiples reprises les crimes de guerre commis par les parties à l’encontre notamment des enfants. Les enquêteurs ont également estimé que certaines des atrocités commises contre ces enfants par le gouvernement syrien et ses milices associées constituaient des crimes contre l’humanité.
LQ/AFP