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L’Italie parie sur Mario Draghi pour sortir de sa crise politique


L'ancien patron de la BCE, 73 ans, est crédité d'avoir sauvé la zone euro en 2012 en pleine crise de la dette. (photo AFP)

Mario Draghi, ex-chef de la Banque centrale européenne, devrait être chargé mercredi de former un gouvernement pour permettre à l’Italie, paralysée depuis la démission de Giuseppe Conte, d’affronter la crise sanitaire et de procéder aux arbitrages du colossal plan de relance financé par l’UE.

Le président de la République Sergio Mattarella, arbitre en cas de crise politique, a accueilli Mario Draghi mercredi en milieu de journée au Palais du Quirinal. S’il accepte sa délicate mission, cet homme affable de 73 ans, crédité d’avoir sauvé la zone euro en 2012 en pleine crise de la dette, devra séduire les principales formations politiques pour avoir une majorité parlementaire.

Enthousiaste, la Bourse de Milan a en tout cas salué mercredi l’arrivée de Mario Draghi en progressant de 2,31% peu après l’ouverture. Et le spread, le très surveillé écart entre le taux de la dette italienne et le taux allemand de référence à dix ans, perdait 7,60 points à 106,05 points de base.

Sergio Mattarella s’est prononcé mardi soir pour un gouvernement de « haut niveau » capable « d’affronter les graves crises actuelles : sanitaire, sociale, économique ». Lançant un appel à tous les partis politiques pour qu’ils soutiennent ce gouvernement, il a fermement exclu la tenue d’élections anticipées en pleine pandémie, qui a déjà fait plus de 89 000 morts dans le pays et mis à terre l’économie.

Ses propos sont intervenus juste après l’annonce d’un échec des consultations pour la reconduction de la coalition sortante menée par Giuseppe Conte, composée du Parti démocrate (PD, centre-gauche), du Mouvement 5 Étoiles (M5S, antisystème jusqu’à son arrivée au pouvoir) et du petit parti Italia Viva (IV) de Matteo Renzi. Matteo Renzi, ex-Premier ministre qui a provoqué l’éclatement du gouvernement en retirant récemment l’appui de son petit parti, jubilait mercredi. « Toutes les personnes de bonne volonté doivent répondre à l’appel du président Mattarella et soutenir le gouvernement de Mario Draghi », a-t-il commenté sur Twitter.

« Merci, président »

Également ravi, Romano Prodi, ex-président de la Commission européenne et Premier ministre (Parti démocrate), a jugé que Draghi « protégera le pays ». « Dans ce moment si délicat, il est indispensable de chercher à rassurer l’Europe sur la crédibilité de notre système », a-t-il déclaré au journal La Stampa. « Merci, président Mattarella », a lancé sur Twitter le Commissaire européen aux affaires économique et monétaires, Paolo Gentiloni, qui figure lui aussi sur la longue liste des Premiers ministres d’un pays à l’instabilité politique chronique.

Pour relancer l’économie exsangue, l’Italie table sur un plan de plus de 200 milliards d’euros financé par le méga-plan européen de relance décidé en juillet par l’Union européenne, alors que la troisième économie de la zone euro a affiché en 2020 l’une des pires chutes du PIB de la zone euro (-8,3%). L’Italie doit présenter ses propositions à Bruxelles d’ici le 30 avril.

Le chef du PD, Nicola Zingaretti, s’est dit « ouvert au dialogue pour le bien du pays ». Mais pour un autre dirigeant du parti, Andrea Orlando, le seul nom de Draghi ne pourra pas « résoudre tous les problèmes » par magie, et il faudra se retrousser les manches pour trouver « une convergence sur un programme de réformes ».

Obtenir l’aval du M5S sera plus compliqué. Le chef des sénateurs M5S au Sénat, Vito Crimi, a déjà annoncé qu’il n’apporterait pas son soutien à « la voie impraticable » d’un « gouvernement technique » provisoire. »Ce type d’exécutif a déjà été adopté dans le passé, avec des conséquences extrêmement négatives pour les citoyens italiens », a-t-il fustigé. Selon lui, le M5S, qui voulait un gouvernement avec des pleins pouvoirs politiques, « ne votera donc pas pour la naissance d’un gouvernement technique dirigé par Mario Draghi ».

LQ/AFP