Le gouvernement espagnol a présenté mardi un projet de loi contre les viols introduisant l’obligation du consentement explicite, après le scandale de viol en réunion de « La Meute » qui avait bouleversé le pays.
« Jusqu’ici les femmes se retrouvaient face à une série d’obstacles: elles devaient prouver qu’il y avait eu des intimidations ou des violences pour pouvoir parler de viol », a déclaré la ministre de l’Égalité Irene Montero, lors d’une conférence de presse à l’issue du conseil des ministres. « Désormais nous n’aurons pas à démontrer la soumission car le consentement sera au centre de la loi », a expliqué cette membre du parti de gauche radicale Podemos, qui gouverne en coalition avec les socialistes du chef du gouvernement Pedro Sanchez.
Ce projet de loi sur la liberté sexuelle, dont le débat au Parlement pourrait prendre des mois, stipule qu’il n’y a pas de consentement « si la victime n’a pas manifesté librement par des actes catégoriques et sans équivoque (…) sa volonté expresse de participer à l’acte ». Le gouvernement a fait de ce texte un symbole à quelques jours de la Journée des droits des femmes du 8 mars qui a donné lieu ces dernières années en Espagne à des manifestations féministes monstres.
« Seul un oui est un oui »
En Espagne, la qualification de viol ne peut pour l’instant être retenue, selon le code pénal, qu’en cas de violence ou d’intimidation. Les autres cas sont considérés comme des abus sexuels, pour lesquels les peines encourues sont plus légères. Ce projet de loi, qui fait par ailleurs du mariage forcé et de la mutilation génitale des délits sexuels, supprime cette différence entre abus et viol. « C’est la loi du ‘seul un oui est un oui’, c’est la loi du mouvement féministe qui s’est battue inlassablement dans la rue » pour cela, a souligné la ministre.
La distinction entre viol et abus sexuel a été au centre de l’affaire dite de « La Meute » qui a été le détonateur d’une puissante vague féministe dans tout le pays en 2018. La condamnation de ces cinq hommes – qui avaient abusé d’une jeune fille lors des fêtes de la San Fermin à Pampelune en 2016 et avait filmé leurs actes – à neuf ans de prison pour abus sexuel et non pour viol avait fait descendre des milliers d’Espagnoles dans la rue et entraîné de nombreux appels à durcir le code pénal. Le tribunal n’avait pas retenu la qualification de viol en raison de l’apparente passivité de la victime. Cette décision avait été confirmée en appel mais la Cour suprême avait finalement requalifié les faits en « viol » en réunion en juin 2019 et aggravé leur peine à 15 ans de prison.
Selon Irene Montero, si la loi est approuvée par le Parlement, elle fera de l’Espagne une « référence internationale » et l’un « des pays en pointe reconnaissant que le consentement est la clé pour déterminer s’il y a viol ». L’Espagne est déjà considérée comme un pays en pointe sur les droits des femmes depuis l’adoption en 2004, sous un précédent gouvernement socialiste, d’une loi pionnière contre les violences commises contre des femmes.
LQ/AFP