Le gouvernement de gauche espagnol a approuvé mardi un projet de loi visant à garantir la liberté sexuelle, qui établit notamment l’obligation d’un consentement explicite, une mesure rare en Europe.
Ce texte « rend clair le fait que le silence ou la passivité ne signifient pas consentement ou que le fait de ne pas manifester son opposition ne peut être une excuse pour agir contre la volonté de l’autre personne », a affirmé la porte-parole du gouvernement, María Jesús Montero, au cours d’une conférence de presse à l’issue du conseil des ministres.
Souvent appelé « la loi du seul oui veut dire oui », ce projet de loi supprime également la distinction entre agression et viol, qui avait été au cœur de l’affaire dite de « la Meute », le viol collectif en 2016 d’une jeune femme par cinq hommes, dont le procès deux ans plus tard avait déclenché une puissante vague féministe dans toute l’Espagne. La condamnation de ces cinq hommes – qui avaient commis ce viol pendant les fêtes de la San Fermin à Pampelune et avaient filmé leurs actes – à neuf ans de prison pour agression sexuelle et non pour viol avait fait descendre dans la rue des dizaines de milliers de femmes et entraîné de nombreux appels à durcir le code pénal.
En Espagne, dans l’état actuel de la législation, la qualification de viol ne peut être retenue qu’en cas de violences ou d’intimidation. Les autres cas sont considérés comme des agressions sexuelles, pour lesquelles les peines encourues sont plus légères. Ce projet de loi s’inspire d’un texte qui avait été présenté en mars 2020 mais qui avait suscité de nombreuses réticences et était resté lettre morte.
Peu de pays en avance sur la question
Contrairement au texte de l’an dernier, le projet de loi adopté mardi ne définit pas, a contrario, ce qui n’est pas un consentement mais détermine clairement la forme que doit prendre celui-ci. « Il sera considéré qu’il y a consentement seulement quand il se sera manifesté librement au moyen d’actes qui, en fonction des circonstances de la situation, expriment de manière claire la volonté de la personne », stipule le texte, selon les médias espagnols qui y ont eu accès.
Par ailleurs, ce projet de loi considère, pour la première fois, le harcèlement de rue, ainsi que le mariage forcé et la mutilation génitale, comme des délits et durcit l’arsenal pénal contre le proxénétisme.
La ministre de l’Égalité, Irene Montero, avait reconnu en 2020 que l’Espagne s’inspirait d’une loi suédoise pionnière qui considère depuis 2018 comme viol tout acte sexuel sans accord explicite. L’Espagne fait figure de pays de référence dans le domaine de la lutte contre les violences faites aux femmes depuis le vote en 2004 d’une loi pionnière introduisant notamment la différence de genre en tant que circonstance aggravante des violences.
Selon l’ONG Amnesty international, seuls quelques pays européens définissent le viol comme un acte sexuel non-consenti. Certains États ont récemment renforcé leur législation à ce sujet.
LQ/AFP