Sous pression de la droite et de l’extrême droite, les 27 pays de l’Union européenne ont entériné lundi un net durcissement de leur politique migratoire, ouvrant notamment la voie à l’envoi de migrants dans des centres situés hors des frontières de l’UE.
- D’ouvrir des centres en dehors des frontières de l’UE pour y envoyer les migrants dont la demande d’asile aurait été rejetée, les fameux « hubs de retour ».
- De sanctionner plus durement ceux qui refusent de quitter le territoire européen, via des périodes de détention plus longues.
- De renvoyer des demandeurs d’asile vers des pays dont ils ne sont pas originaires mais que l’Europe considère comme « sûrs ».
La baisse des arrivées – environ 20% d’entrées irrégulières en moins par rapport à l’an dernier – n’a pas fait retomber la pression sur les responsables politiques du Vieux continent. Bien au contraire.
« Il est vraiment important que nous donnions aux citoyens le sentiment que nous maîtrisons ce qui se passe », a martelé le commissaire européen Magnus Brunner, architecte de ce tour de vis migratoire.
La France et l’Espagne sceptiques
Ses idées font bondir la gauche et les associations de protection des exilés, qui dénoncent des mesures violant les droits humains.
« Au lieu d’investir dans la sécurité, la protection et l’inclusion, l’UE choisit des politiques qui plongeront davantage de personnes dans le danger et l’insécurité juridique », alerte Silvia Carta de PICUM, une ONG de protection des sans-papiers.
Sous l’impulsion du Danemark, qui assure la présidence tournante de l’Union européenne et défend de longue date ce durcissement migratoire, les États membres ont avancé au pas de charge dans leur examen des mesures.
Il existe de fait une « volonté politique largement partagée » parmi les Vingt-Sept pour valider ces propositions, affirme un diplomate.
Parmi les rares sceptiques : la France, qui s’interroge sur la légalité et l’efficacité de certaines de ces mesures, et l’Espagne, pas convaincue par les « hubs de retour », déjà expérimentés par plusieurs pays, mais sans réel succès.
Cette position est toutefois de plus en plus « difficile à tenir » tant la pression exercée par certains pays pour les adopter est forte, assure le ministre espagnol de l’Intérieur Fernando Grande-Marlaska.
Ces mesures bénéficient aussi du net soutien de la droite et de l’extrême droite qui se sont alliées au Parlement européen la semaine dernière pour leur accorder de premiers feux verts.
Là encore, l’idée est d’avancer vite, de nombreux eurodéputés et dirigeants plaidant pour leur adoption finale en début d’année prochaine.
20 000 euros par demandeur d’asile
Les Vingt-Sept se sont par ailleurs accordés lundi sur un nouveau système de répartition des demandeurs d’asile en Europe.
Afin de soulager les pays se situant le long des routes migratoires, comme la Grèce et l’Italie, l’UE exigera bientôt que les autres États membres relocalisent des demandeurs d’asile sur leur sol. Ou versent, à défaut, une contribution financière de 20 000 euros par demandeur d’asile aux pays sous pression.
Les pays de l’UE ont négocié durant plusieurs semaines sur la manière de mettre en place ce système, qui entrera en vigueur en juin prochain.
Les tractations autour de ce dossier ont été particulièrement ardues, tant les pays disposés à accueillir des demandeurs d’asile en provenance d’un autre État membre sont rares dans le contexte politique actuel.
« Il y a peu de ministres de l’Intérieur qui vont vouloir venir devant la presse et dire ok j’en ai pris 3 000 », explique un responsable européen, s’exprimant sous couvert d’anonymat.
La répartition exacte décidée par les Vingt-Sept lundi est confidentielle.