Les États-Unis vont retirer les rebelles Houthis du Yémen de leur liste de groupes terroristes, une désignation que les organisations humanitaires jugeaient néfaste aux efforts d’aide sur le terrain, tandis que les belligérants des deux camps ont loué les efforts de paix de Washington dans leur pays.
Le secrétaire d’État Antony Blinken a informé vendredi le Congrès de son intention de retirer les Houthis de la liste des groupes considérés comme terroristes par Washington, a annoncé le département d’État.
« Nous avons formellement notifié au Congrès l’intention du secrétaire d’État d’annuler » cette désignation, a déclaré un porte-parole du département d’État. La mesure prendra effet rapidement.
Les Houthis avaient été classés parmi les groupes terroristes par l’administration du président Donald Trump, et des organisations d’aide humanitaire estimaient que cette désignation entravait leur action sur le terrain.
Conséquences humanitaires
Le porte-parole du département d’État a précisé que la mesure annoncée vendredi se fondait uniquement sur ces considérations. « Cette décision n’a rien à voir avec ce que nous pensons des Houthis et de leur conduite répréhensible, dont des attaques contre des civils et l’enlèvement de citoyens américains », a-t-il dit.
« Nous nous sommes engagés à aider l’Arabie saoudite à défendre son territoire contre de nouvelles attaques. Notre action est due uniquement aux conséquences humanitaires de cette désignation de dernière minute de l’administration précédente, dont les Nations unies et des organisations humanitaires ont depuis dit clairement qu’elle allait accélérer la plus grave crise humanitaire au monde », a expliqué le porte-parole.
Des organisations humanitaires ont déclaré qu’elles n’avaient pas d’autre choix que de traiter avec les Houthis, qui gouvernent de facto une grande partie du Yémen dont la capitale Sanaa, et que leur désignation comme terroristes les exposaient au risque d’être poursuivies en justice par les États-Unis.
Un conflit de plus de six ans
Le prédécesseur d’Antony Blinken, Mike Pompeo, avait justifié cette mesure en soulignant les liens des Houthis avec l’Iran, auquel le président Trump était très hostile, et en rappelant une attaque meurtrière des rebelles le 30 décembre sur l’aéroport d’Aden, la deuxième ville du Yémen.
La mesure annoncée vendredi intervient après un discours du président Joe Biden dans lequel il a annoncé la fin du soutien des États-Unis à la coalition militaire menée par l’Arabie saoudite qui combat les Houthis au Yémen.
Les belligérants ont réaffirmé leur volonté de mettre fin au conflit après l’engagement de Joe Biden à soutenir les « efforts diplomatiques », mais une solution apparaît toujours hors de portée à ce stade, estiment des experts.
Le conflit oppose depuis plus de six ans les rebelles Houthis aux forces gouvernementales, soutenues depuis 2015 par une coalition menée par l’Arabie saoudite. Il a fait des dizaines de milliers de morts et des millions de déplacés, selon des organisations internationales, et provoqué la pire crise humanitaire au monde, selon l’ONU.
« Cette guerre doit cesser »
Dans son premier discours de politique étrangère depuis qu’il a succédé à Donald Trump, Joe Biden a mis fin jeudi au soutien américain à la coalition et a appelé à renforcer les efforts diplomatiques pour mettre fin au conflit. « Cette guerre doit cesser », a-t-il martelé, annonçant l’annulation de ventes d’armes à l’Arabie saoudite.
Joe Biden a confirmé la nomination d’un diplomate chevronné, Timothy Lenderking, comme émissaire des États-Unis pour le Yémen.
Le gouvernement yéménite reconnu par la communauté internationale a salué ces annonces, soulignant « l’importance de soutenir les efforts diplomatiques » et saluant la nomination de M. Lenderking comme une « étape importante » pour « mettre fin à la guerre causée par les Houthis soutenus par l’Iran ».
L’Iran nie fournir des armes aux Houthis mais ne cache pas son soutien politique aux rebelles. Les Houthis ont apporté leur soutien à l’approche de la nouvelle administration américaine, qui avait indiqué dès janvier qu’elle reconsidérerait la décision de Donald Trump d’inscrire les rebelles sur sa liste des organisations terroristes.
« C’est de la propagande »
« Nous sommes prudemment optimistes », a indiqué Hamid Assem, un responsable Houthi. « Nos missiles ne s’arrêteront pas tant qu’il n’y aura pas de cessez-le-feu (…) Ce sont eux qui ont commencé la guerre, ce sont eux qui doivent y mettre fin », a-t-il toutefois prévenu, se référant aux forces gouvernementales et à leurs alliés.
Sans mentionner la fin du soutien américain à la coalition, Riyad a salué « l’engagement » de M. Biden « à coopérer avec le royaume pour défendre sa souveraineté et contrer les menaces contre elle ». L’Arabie saoudite est depuis des mois la cible d’attaques répétées menées par les rebelles.
Adel al-Jubeir, ministre d’État saoudien aux Affaires étrangères, a exprimé sur Twitter sa « hâte » de travailler avec les « amis américains pour mettre fin aux conflits ». Mais sur le terrain, une solution apparaît quasiment impossible. « La guerre ne prendra pas fin, personne ne veut y mettre fin. C’est de la propagande », assène Huda Ibrahim, femme au foyer de 38 ans qui habite la ville portuaire de Hodeida, par laquelle transite l’essentiel de l’aide humanitaire.
AFP/LQ