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Législatives en Autriche : l’extrême droite vise une première place inédite


(Photo : AFP)

Son heure est-elle venue ? L’extrême droite, dirigée par le très radical Herbert Kickl, espère remporter dimanche pour la première fois les législatives en Autriche, mais la course avec les conservateurs s’annonce serrée.

Le Parti de la Liberté (FPÖ) a déjà goûté au pouvoir, mais n’a encore jamais fini en tête d’un scrutin national.

Cette fois, il veut y croire, fort de sa victoire aux élections européennes de juin, dans un contexte de montée de l’extrême droite en Europe.

« Je ne veux pas d’un régime nazi », s’inquiète dans les rues de Vienne Rachel Schwarzböck. Cette retraitée de 74 ans, d’origine israélienne et polonaise, se dit particulièrement « préoccupée » du fait de son histoire personnelle.

Signe de ses ambitions, Herbert Kickl, 55 ans, a convoqué ses partisans pour vendredi en fin d’après-midi au cœur de la capitale, au pied de la majestueuse cathédrale Saint-Étienne.

Les sondages donnent cette formation fondée par d’anciens nazis à 27%, contre 25% pour les conservateurs de l’ÖVP qui ont repris du terrain ces derniers jours.

« Stabilité » 

Leur chef de file, Karl Nehammer, a lancé dans la matinée, du siège de ce parti, un appel à voter « contre la radicalité, pour la stabilité, et non le chaos ».

« Les Autrichiens ont leur destin entre leurs mains », a insisté le chancelier de 51 ans, réaffirmant son refus de s’allier avec son rival Herbert Kickl sans rejeter pour autant l’éventualité d’une coalition gouvernementale avec le FPÖ.

Au gré de la campagne, les conservateurs ont « bien réussi à se présenter comme un parti au centre de l’échiquier politique », explique Andreas Eisl, chercheur à l’institut Jacques Delors. Entre d’un côté la ligne dure du FPÖ, de l’autre la posture « très à gauche » des sociaux-démocrates du SPÖ, crédités de seulement 20% des suffrages.

M. Nehammer a aussi profité de sa gestion des inondations provoquées par la tempête Boris, qui a provisoirement suspendu les débats politiques.

Dans tous les scénarios imaginés, sauf énorme surprise, l’ÖVP – qui gouverne actuellement avec les Verts – devrait conserver la chancellerie à l’issue du vote des 6,3 millions d’électeurs sur neuf millions d’habitants, pronostiquent les experts.

Mais avec quels partenaires ?

Si l’ÖVP finit au coude-à-coude avec l’extrême droite, c’est une coalition entre les deux forces qui se dessinent, comme en 2000 et 2017.

Leurs vues convergent « sur de nombreux sujets », note M. Eisl, et « des solutions créatives » pourraient être trouvées pour composer avec Herbert Kickl.

Neutralité et « remigration » 

Paradoxalement, une large victoire du FPÖ l’écarterait probablement du gouvernement.

Car dans ce système parlementaire rompu aux longues tractations, l’ÖVP, au pouvoir depuis 1987, « n’acceptera pas d’être le partenaire minoritaire », commente le politologue viennois Thomas Hofer. Il préfèrera s’associer avec les sociaux-démocrates et les libéraux de Neos, un format à trois qui serait inédit.

Malgré tout, une première place de l’extrême droite le soir du vote constituerait « un séisme » pour ce pays alpin, estime l’analyste.

Au plus bas il y a cinq ans après le scandale de corruption de l’Ibizagate, le FPÖ a opéré une remontée spectaculaire, sous l’impulsion d’un Herbert Kickl stratège qui a reconstruit ce parti.

Fustigeant tous azimuts les mesures prises contre le covid, la vie chère, les politiques climatiques ou encore les sanctions contre la Russie au nom de la neutralité autrichienne, son discours a fait mouche.

Comme ailleurs en Europe, de Giorgia Meloni en Italie à Marine Le Pen en France, il a prospéré sur les peurs sociales et économiques présentes sur le continent.

Proche de certains groupuscules décriés, celui qui veut, au pays natal d’Adolf Hitler, se faire appeler comme lui « Volkskanzler » (chancelier du peuple), a repris à son compte le terme de « remigration », avec comme projet de déchoir de leur nationalité et d’expulser des Autrichiens d’origine étrangère.

Et si M. Kickl ne devait pas gouverner, observe M. Hofer, « il pourrait s’accommoder d’une telle situation qui lui permettrait de cultiver son message anti-élite » et de semer le désordre, au moment où l’Autriche traverse une mauvaise passe économique.

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