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Le réchauffement rend incertaine la sécurité alimentaire mondiale


"Il y a une probabilité de 98% qu'au moins une des cinq prochaines années, et la période de cinq ans dans son ensemble, soit la plus chaude jamais enregistrée", a souligné l'OMM.

L’accélération du réchauffement climatique fait peser de fortes incertitudes sur la production agricole mondiale dans les prochaines décennies, ont averti dimanche des scientifiques, certains jugeant inévitables de profonds changements de la société pour y faire face.

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Au niveau mondial, la capacité actuelle d’utilisation des terres et la productivité vont continuer à dégrader les sols selon certains scientifiques. (Photo : AFP)

« Nous pourrons nourrir le monde en 2050 mais pour cela il faudra prendre des mesures pour minimiser les effets du changement climatique sur la production agricole », a estimé Jerry Hatfield, directeur du laboratoire national américain pour l’agriculture et l’environnement.

Il a expliqué lors d’une présentation à la conférence de l’American Society for the Advancement of Science (AAAS), réunie à San Jose en Californie, qu’il faudra doubler la production alimentaire dans les 35 prochaines années pour nourrir les neuf milliards de personnes que comptera la planète en 2050 contre sept milliards aujourd’hui. Ce sera l’équivalent de ce que l’agriculture mondiale a produit depuis cinq siècles.

« Mais l’extrême volatilité des précipitations dans les grandes plaines de cultures américaines par exemple, l’accroissement de la sécheresse couplée à une montée des températures, affecte les rendements agricoles, ce qui nécessite d’agir pour minimiser le réchauffement », a-t-il insisté.

> Dégradation rapide des sols

Au niveau mondial, la capacité actuelle d’utilisation des terres et la productivité vont continuer à dégrader les sols, a-t-il ajouté. « Il y a de très grandes probabilités que les températures vont continuer à augmenter dans le Middle West – le grenier à céréales des Etats-Unis -, que les sécheresses seront plus sévères et que les très fortes précipitations vont se produire régulièrement », a souligné Kenneth Kunkel, un climatologue de l’agence américaine océanographique et atmosphérique (NOAA), qui a étudié l’impact du réchauffement sur les cultures de maïs dans le Middle West.

« La plus grande menace à la sécurité alimentaire, tout au moins pour le Middle West, est la sécheresse », a affirmé ce scientifique devant la conférence annuelle de l’AAAS. Les grandes plaines américaines vont probablement connaître au 21e siècle des sécheresses bien pires que celles du dernier millénaire, menaçant ses habitants, avaient annoncé jeudi d’autres scientifiques au premier jour de la conférence. Leur prédiction repose sur des simulations effectuées avec 17 modèles informatiques sur l’évolution du climat.

« Le changement climatique se produit tellement vite que nous allons faire face à une situation sans précédent dans l’histoire de la civilisation humaine face à laquelle nous n’avons aucune expérience », a relevé le climatologue. « Si nous pouvons – en réduisant les émissions de gaz à effet de serre, ndlr – freiner le réchauffement, nous pourrions avoir plus de temps pour trouver des solutions », selon lui. Mais cela ne paraît pas se produire vu l’absence de consensus dans la société pour agir contre le changement climatique, a-t-il déploré.

> Réduire le gaspillage

James Gerber, expert agricole de l’Université du Minnesota, a noté que parmi les mesures utiles face au risque de crise de la production alimentaire figuraient une réduction de l’énorme gaspillage dans la consommation ainsi qu’une diminution de viande rouge dans le régime alimentaire. Cela permettrait de réduire la taille des cheptels et leur impact environnemental. Ils sont responsables de 15% des émissions mondiales de méthane, un puissant gaz à effet de serre. Il n’a pas non plus écarté un recours plus étendu aux récoltes OGM.

Ce chercheur a identifié « des facteurs un peu préoccupants comme la diminution des réserves mondiales de céréales qui réduit la marge de sécurité alimentaire. » Il s’est aussi inquiété du fait que la plus grande partie de la production céréalière soit concentrée dans des régions vulnérables au réchauffement. Pour Jerry Hartfield, il va falloir malgré ces contraintes accroître les rendements des cultures en recourant à la génétique et à une gestion différente de l’environnement.

Plus sombre, Paul Ehrlich, président du « Center for conservation biology », à l’Université Stanford, a estimé que « nous sommes confrontés à un problème gigantesque qui va nécessiter un véritable changement social et culturel sur toute la planète et nous avons très peu de temps », a-t-il lancé. « Si nous avions mille ans pour résoudre ce problème je serais très relaxé mais nous avons peut-être dix ou vingt ans », a ajouté l’Universitaire.

AFP