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Le Japon approuve une révision majeure de sa doctrine de défense face à la Chine


Le Japon entend notamment se doter d'une "capacité de contre-attaque. Photo : AFP

Le gouvernement japonais a approuvé vendredi une révision radicale de sa doctrine de défense pour tenter notamment de contrecarrer la puissance militaire chinoise, qualifiée par Tokyo de « défi stratégique sans précédent » à la sécurité de l’archipel.

Le Japon prévoit ainsi, dans le cadre de la plus grande refonte de sa politique de défense depuis des décennies, de gonfler drastiquement ses dépenses militaires, d’unifier son commandement et d’augmenter la portée de ses missiles.

Bien que ces changements soient soutenus par l’opinion publique nippone, il s’agit d’un virage majeur pour ce pays dont la Constitution pacifiste adoptée au lendemain de sa défaite à la fin de la Seconde guerre mondiale lui interdit en principe de se doter d’une véritable armée.

Mais pour ses architectes à Tokyo, cette doctrine révisée est plutôt « la dernière étape en date d’une lente et graduelle normalisation » de la position japonaise en matière de défense et de sécurité nationale, a estimé James Brady, vice-président du cabinet d’études Teneo.

La doctrine défensive nippone est ébauchée dans trois documents faisant clairement référence à la Chine, la Corée du Nord et la Russie. Ces documents adoptent un langage plus affirmé que lors de la première publication de la stratégie nationale de sécurité du Japon en 2013.

« Défi stratégique » chinois

La posture militaire de plus en plus affirmée de la Chine y est décrite comme une « grave préoccupation pour le Japon et la communauté internationale », Pékin étant un « défi stratégique sans précédent à la paix et la stabilité du Japon ».

Au centre de sa nouvelle « stratégie de sécurité nationale », le Japon prévoit de doubler son budget annuel de défense en le faisant passer d’environ 1% de son PIB à 2% d’ici 2027, ce qui provoque déjà des critiques sur la manière dont cette augmentation sera financée.

Le pays s’alignerait ainsi sur un engagement similaire déjà pris par les pays membres de l’Otan.

Le Japon entend notamment se doter d’une « capacité de contre-attaque », un concept qui jusqu’à récemment aurait été jugé incompatible avec sa Constitution. Cela lui permettrait de frapper des cibles menaçant l’archipel depuis des pays voisins.

« La capacité de contre-attaque est nécessaire », affirment les documents, notant que le système actuel destiné à abattre d’éventuels missiles avant qu’ils ne tombent sur le sol japonais n’est pas suffisamment efficace, mais qu’aucune frappe préventive « ne saurait être tolérée » en vertu de la Constitution.

Les documents du gouvernement font mention des missiles de croisière américains Tomahawk, dont les médias locaux ont rapporté récemment que le Japon souhaitait en acquérir jusqu’à 500, ainsi que des missiles de longue portée SM-6.

La présence des Forces d’autodéfense sur les îles les plus méridionales du Japon, les plus proches de Taïwan et donc de la Chine, devrait en outre être augmentée, avec notamment un quasi-triplement des unités d’interception de missiles balistiques, selon les médias nippons.

« Menace » nord-coréenne

Les documents consultés indiquent que le Japon prévoit de renforcer les capacités de ses garde-côtes et d’accroître sa coopération avec les armées et les garde-côtes d’autres pays, sans offrir plus de précisions.

Les inquiétudes de longue date du Japon vis-à-vis de la Chine sont encore montées d’un cran en août dernier quand Pékin a multiplié les exercices militaires à proximité de Taïwan, lors desquels des missiles sont tombés en mer dans la zone économique exclusive (ZEE) de l’archipel nippon.

La stratégie nationale de sécurité fait aussi référence aux tirs de missiles à répétition de la Corée du Nord, déclarant que les actions militaires de Pyongyang représentent « une menace plus grave et plus imminente pour le Japon que précédemment ».

Quant à la Russie, sa « volonté de recourir à la force pour atteindre ses propres objectifs de sécurité, comme en Ukraine, est évidente » et ses activités militaires dans la région Asie-Pacifique ainsi que sa coopération stratégique avec la Chine « constituent une forte préoccupation en matière de sécurité », ajoutent les documents.

La nouvelle stratégie japonaise a déjà provoqué, avant même son annonce officielle, l’irritation de Pékin, qui fait régulièrement allusion au brutal militarisme nippon de la première moitié du XXe siècle dont la Chine fut l’une des victimes.

« Le Japon ne tient pas compte des faits, s’écarte des accords communs, de son engagement en faveur des relations bilatérales et discrédite la Chine. Nous sommes fermement opposés à cela », a dit vendredi le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Wang Wenbin, précisant que Pékin avait protesté solennellement auprès de Tokyo.