Le numéro un d’Al-Qaïda, organisation jihadiste en perte de vitesse face au groupe Etat islamique (EI), a fait allégeance jeudi au nouveau chef des talibans, le mollah Akhtar Mansour, lui même contesté par une partie des membres de son mouvement.
«En ma qualité de chef du groupe Al-Qaïda, je vous fais allégeance, comme l’avait fait le cheikh Oussama ben Laden et ses frères, aujourd’hui martyrs, au commandeur des croyants le mollah Omar», défunt chef des talibans, déclare, après des mois de silence, le chef d’Al-Qaïda Ayman Al-Zawahiri dans un message audio diffusé par des sites islamistes.
Ce message est précédé par une vidéo montrant Oussama ben Laden, tué dans un raid des forces spéciales américaines au Pakistan en 2011, faisant allégeance dans le passé au mollah Omar.
Ce dernier est mort il y a deux ans mais son décès n’a été confirmé que fin juillet par le groupe extrémiste.
Le mollah Mansour, son ancien bras droit, lui a succédé mais s’est rapidement retrouvé contesté au sein même de sa nébuleuse.
Une frange de la rébellion islamiste l’accuse d’avoir été désigné au terme d’un processus expéditif et d’avoir menti pendant deux ans sur l’état de santé du mollah Omar, qui s’est éteint en avril 2013 au Pakistan, selon les services secrets afghans.
Conforme à la tradition
Le porte-parole des talibans, Zabihullah Mujahid, a confirmé avoir reçu le message d’allégeance du chef d’Al-Qaïda mais a indiqué à l’AFP que les insurgés islamistes «ne veulent pas faire de commentaire à ce stade».
«L’annonce de Zawahiri est logique et conforme à la tradition islamique en matière de gouvernance et de succession», a commenté l’analyste pakistanais Imtiaz Gul, spécialiste d’Al-Qaïda et des talibans.
«C’est en ligne avec leur idéologie politique (…) qui rejette l’idée d’une succession héréditaire», a-t-il expliqué.
Après la désignation du mollah Mansour, le fils et le frère du mollah Omar avaient rapidement remis en cause la légitimité de celui qui est devenu le nouveau «commandeur des croyants».
Peu après, le chef du bureau politique des talibans, établi en 2013 au Qatar pour y faciliter un éventuel dialogue de paix avec le gouvernement afghan, Tayeb Agha, a démissionné de ses fonctions.
Ce dialogue divise les cadres des talibans constitue un des dossiers brûlants dont a hérité le mollah Mansour.
Après un premier cycle de pourparlers organisé début juillet au Pakistan, une deuxième rencontre devait avoir lieu récemment, mais elle a été reportée sine die après l’annonce de la mort du mollah Omar.
Al-Qaïda concurrencée par l’EI
Dans son message d’allégeance, Ayman Al-Zawahiri réaffirme l’aversion de son groupe pour les régimes des pays musulmans qui n’appliquent pas la charia et son hostilité à l’Occident.
Il promet de «libérer tous les territoires musulmans».
Ces thèmes forts de la nébuleuse d’Oussama ben Laden qui avaient fait trembler le monde au début des années 2000 ont du mal à cacher le recul de l’organisation face à son grand concurrent, le groupe Etat islamique (EI) et son calife autproclamé, Abou Baakr al-Baghdadi.
Depuis que l’EI a conquis des pans entiers de la Syrie et de l’Irak, ce groupe ne cesse d’attirer de nouveaux candidats au jihad violent.
Les talibans ont qualifié de «brutale» et «horrible» une vidéo montrant des combattants présumés de l’EI en Afghanistan faire exploser leurs prisonniers, une dénonciation qui témoigne de la rivalité croissante entre ces deux groupes extrémistes.
Cette rivalité est alimentée par un différend de fond qui concerne le refus des talibans et d’Al-Qaïda de la proclamation d’un califat.
AFP