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Le casse-tête du glyphosate se prolonge pour l’UE


(Photo : AFP)

L’UE n’a pas trouvé mercredi de solution qui permette de rassembler une majorité d’Etats membres sur le sort du glyphosate, renvoyant la décision sur cet herbicide controversé, dont la licence expire en décembre, à une date ultérieure.

« Plusieurs options ont été discutées », a déclaré, sans plus de détails, une porte-parole de la Commission. L’exécutif européen espérait pourtant organiser un vote mercredi à l’occasion d’une réunion à huis clos d’un comité d’experts représentant les 28.

Il va maintenant prendre le temps de « réfléchir » avant de proposer « sous peu » une nouvelle date de réunion. Le ministère danois de l’Environnement a expliqué sur Twitter qu’il avait été « impossible de s’entendre sur la proposition de la Commission ».

Cette dernière a abandonné son premier projet, qui était de proposer une reconduction de l’autorisation du glyphosate pour dix ans. La saga dure depuis plus de deux ans dans l’UE. Agacée de voir les Etats membres se défiler, la Commission répète inlassablement depuis l’été que la décision doit être une « responsabilité partagée ».

Elle en a pris plus d’un par surprise en annonçant mardi après-midi qu’elle était désormais ouverte à une autorisation entre cinq et sept ans. Plusieurs Etats membres -France, Autriche, Italie, Belgique- ont publiquement exprimé leur opposition à une autorisation valable pour encore une décennie.

Paris a précisé à l’issue de la réunion de mercredi avoir travaillé « avec la Commission et ses partenaires européens, en particulier l’Allemagne et l’Italie, pour dégager un compromis sur une période qui n’aille pas au-delà de quatre ans ». En Allemagne, en pleines négociations pour une coalition de gouvernement, le sujet « va devoir être discuté » entre conservateurs, écologistes et libéraux, a indiqué de son côté Steffen Seibert, porte-parole du gouvernement. Sans les poids lourds de l’UE, difficile d’obtenir une majorité qualifiée (55% des Etats membres et 65% des habitants).

La Commission a assuré mercredi que son objectif restait de « trouver une solution qui bénéficie du soutien le plus large possible, qui assure un haut niveau de protection de la santé humaine et de l’environnement, en conformité avec la législation européenne et fondée sur les données scientifiques disponibles ».

Elimination progressive

A l’image de la France, la Belgique s’est rangée à l’idée d’une disparition progressive du glyphosate des sols de l’UE. La question est alors de savoir quel délai est nécessaire pour préparer les cultivateurs à la perspective d’une agriculture sans glyphosate, plébiscité pour son efficacité et son faible coût.

Cinq ans, ont répondu les eurodéputés. Dès la fin de l’année même pour tout usage non-professionnel. Ils s’étaient exprimés mardi en faveur d’une élimination progressive d’ici à fin 2022, avec des mesures d’accompagnement pour les agriculteurs.

« Le Parlement européen a clairement indiqué à la Commission européenne la direction de la sortie », ont souligné les parlementaires socialistes Eric Andrieu et Marc Tarabella. Pour leur collègue Michèle Rivasi des Verts, « la volonté et les solutions existent » pour se détacher d' »un ancien modèle agricole, toxique et dépassé ». La Commission, elle, ne manque pas de souligner que même si le glyphosate est autorisé au niveau de l’UE, les Etats membres gardent la possibilité d’interdire sur leur territoire national des produits qui en contiennent.

Situation renversée

Pour Franziska Achterberg, de Greenpeace, un « renversement de situation » s’est opéré. « A moins que la Commission ne soutienne une interdiction, elle continuera d’échouer », a prédit la militante. La campagne intensive des ONG contre le glyphosate a trouvé écho auprès des 1,3 million de personnes qui ont signée une pétition paneuropéenne, un des plus gros succès pour ce type d’initiative citoyenne dans l’UE. De sujet de discussions techniques entre spécialistes des produits phytosanitaires, le glyphosate est devenu un enjeu politique, au grand dam de l’industrie.

« C’est décevant qu’il n’y ait toujours pas de décision claire », a commenté Graeme Taylor, de l’Association européenne des producteurs de pesticides (ECPA). « La science est maintenant écartée dans une partie de roulette politique où les enjeux sont très élevés », a-t-il déploré.

Partisans et opposants s’affrontent autour de l’évaluation scientifique de la toxicité du glyphosate, depuis la publication en 2015 du rapport du Centre international de recherche sur le cancer, un organe de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui a classé la substance « cancérogène probable », au contraire des agences européennes, l’Efsa (sécurité des aliments) et l’Echa (produits chimiques). Sont venues s’ajouter au débat les accusations d’influence exercée par le géant de l’agrochimie Monsanto sur le contenu des études scientifiques publiées.

Le Quotidien / AFP