Les séparatistes prorusses ont annoncé avoir lancé une offensive contre le port stratégique de Marioupol où 30 civils au moins ont péri, contraignant le président ukrainien à convoquer en urgence le Conseil de sécurité nationale dimanche.
Tirs d’artillerie des séparatistes pro-russes le 4 septembre 2014, dans la banlieue de Marioupol, port stratégique. (Photo : AFP)
« L’offensive sur Marioupol a débuté aujourd’hui », a déclaré le dirigeant de la république autoproclamée de Donetsk, Alexandre Zakhartchenko, tout en assurant qu’il n’y aurait « pas d’assaut ».
La conquête de cette ville industrielle d’un demi-million d’habitants, dernière grande ville de l’Est ukrainien sous contrôle de Kiev, créerait un pont terrestre entre la Russie et la Crimée, annexée en mars mais très dépendante de Kiev pour ses approvisionnements en eau, électricité et produits alimentaires.
Alexandre Zakhartchenko a nié la responsabilité des rebelles dans les bombardements au lance-roquettes samedi matin dans un quartier densément peuplé en accusant les forces de Kiev. Mais, après analyse des impacts, des observateurs de l’OSCE ont conclu que les roquettes provenaient de deux localités contrôlées par les séparatistes. Elles sont tombées à 400 mètres d’un barrage de l’armée ukrainienne, selon eux.
> Porochenko convoque son Conseil de sécurité
Le président ukrainien Petro Porochenko a dénoncé un « acte terroriste » et un « crime contre l’humanité » et promis que son pays allait se battre jusqu’à la « victoire totale » contre les séparatistes. Il a écourté sa visite en Arabie Saoudite, pour les obsèques du roi Abdallah, pour présider dimanche une réunion extraordinaire du Conseil de sécurité nationale et de défense. Celle-ci est convoquée « pour mettre en oeuvre des mesures supplémentaires compte tenu d’une brusque dégradation de la situation dans l’Est », selon la présidence.
Selon la représentante de la diplomatie européenne, Federica Mogherini, cette escalade va « inévitablement provoquer une grave détérioration des relations entre l’UE et la Russie », déjà lourdement frappée par les sanctions européennes et américaines, Moscou démentant toute implication dans le conflit. Selon des sources de l’UE, les chefs de la diplomatie des 28 pourraient être convoqués dans la semaine à Bruxelles sur le dossier ukrainien.
La Lettonie, présidente en exercice de l’UE, a réclamé de nouvelles sanctions contre la Russie « pleinement responsable de l’attaque des séparatistes contre Marioupol », dans un tweet du chef de la diplomatie Edgars Rinkevics. Le secrétaire d’Etat américain John Kerry a demandé à Moscou de « mettre fin immédiatement » à son soutien aux séparatistes, tandis que le vice-président Joe Biden s’est entretenu samedi avec le président ukrainien, les deux hommes blâmant la Russie pour ne pas se conformer aux engagements des accords de paix de Minsk en septembre, selon un communiqué.
Le ministre allemand des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier, a de son côté jugé « très dangereuse » l’escalade en Ukraine. Le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon a « condamné fermement » les bombardements, de même que l’OSCE et l’Otan. A Kiev, le Premier ministre Arseni Iatseniouk a exigé la convocation d’une réunion d’urgence du Conseil de sécurité de l’ONU.
> Escalade du conflit
Dès samedi soir, les 15 pays du Conseil ont tenté en vain de mettre au point une déclaration sur Marioupol, à l’initiative de Londres. Mais la Russie a bloqué cette initiative, selon des diplomates occidentaux.
La mission russe à l’ONU a de son côté rejeté la responsabilité du blocage sur le Royaume-Uni. Celui-ci, a-t-elle expliqué, « a insisté pour condamner certaines des déclarations des forces d’auto-défense » (séparatistes pro-russes), alors que « les membres occidentaux du Conseil pendant tout le conflit ont refusé de condamner les déclarations et actions souvent très agressives de Kiev ».
L’attaque survenue quelques jours après l’abandon par l’armée ukrainienne de l’aéroport de Donetsk, site hautement symbolique, marque un tournant dans le conflit qui a fait plus de 5000 morts en neuf mois.
AFP