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L’Arménie secouée par une crise politique, son Premier ministre contesté


Depuis dix jours, des dizaines de milliers de personnes manifestent à Erevan. (photo AFP)

La crise politique qui secoue l’Arménie depuis une dizaine de jours s’est aggravée dimanche, avec l’échec d’une rencontre entre le Premier ministre Serge Sarkissian et son principal opposant, et la poursuite de manifestations émaillées de heurts avec la police.

Le député Nikol Pachinian, figure de proue de la contestation, a été appréhendé lors de la dispersion d’une nouvelle manifestation à Erevan, dans des conditions confuses. Un parlementaire de l’opposition, Sassoun Mikaelian, a annoncé qu’il avait été « arrêté » par les forces de l’ordre et a réclamé sa libération « par le peuple ». La police pour sa part a affirmé qu’il avait été « évacué de force » du rassemblement antigouvernemental dont il avait pris la tête.

Nikol Pachinian avait quelques instants plus tôt participé à une rencontre devant les caméras de télévision avec Serge Sarkissian dans un grand hôtel de la capitale arménienne, qui a tourné court après quelques vifs échanges entre les deux hommes. « Je suis venu pour parler de votre démission », a lancé Nikol Pachinian à son interlocuteur, devant les caméras. « Ce n’est pas un dialogue, c’est du chantage », a répondu ce dernier. « Je ne peux que vous conseiller de revenir dans un cadre légal, sinon vous porterez la responsabilité » de ce qui peut arriver, a-t-il ajouté. L’échange acrimonieux s’est poursuivi. « Vous ne comprenez pas la situation en Arménie, le pouvoir est maintenant entre les mains du peuple », a déclaré Nikol Pachinian. Ce à quoi le Premier ministre a répliqué qu’ « un parti qui a enregistré un score de 8 pour cent aux élections (législatives) ne peut pas parler au nom du peuple », avant de quitter la salle.

Pauvreté et corruption

Le député Nikol Pachinian, 42 ans, est un ancien journaliste et opposant de longue date qui a brièvement été en prison après avoir déjà pris part à des mouvements de protestation contre Serge Sarkissian en 2008 qui avaient fait 10 morts. A l’appel de Pachinian des manifestations se sont succédé au cours des dix derniers jours à Erevan. Samedi, plusieurs dizaines de milliers de personnes se sont encore rassemblées sur la place de la République, dans le centre de la capitale.

Les protestataires accusent Serge Sarkissian, qui vient d’achever son deuxième mandat présidentiel, de s’accrocher au pouvoir en s’étant fait élire Premier ministre par les députés. Alors que la Constitution interdit au président d’effectuer plus de deux mandats, Sarkissian avait fait voter en 2015 une réforme controversée donnant l’essentiel des pouvoirs au Premier ministre.

Au-delà des manœuvres de Serge Sarkissian pour rester au pouvoir après plus d’une décennie au poste de président, les manifestants reprochent à cet ancien militaire de 63 ans de n’avoir pas su faire reculer la pauvreté et la corruption, alors que les oligarques ont toujours la haute main sur l’économie du pays.

Le Quotidien/AFP