La perspective d’une extradition dans son pays de l’ex-président catalan Carles Puigdemont, détenu depuis près de 10 jours en Allemagne, se rapproche avec des réquisitions du parquet s’affirmant mardi en faveur d’une remise à l’Espagne.
Le procureur général de l’État régional allemand de Schleswig-Holstein, où l’indépendantiste est incarcéré, a reconnu dans un communiqué la validité en droit allemand des deux chefs d’inculpation de la justice espagnole de « rébellion » et « détournement de fonds » et demandé son maintien en détention en vue de l’extradition. La décision finale devra toutefois encore être prise par le tribunal allemand compétente de Schleswig dans les jours ou semaines à venir.
Après une « évaluation détaillée du mandat d’arrêt européen » lancé par le justice espagnole 23 mars, le parquet allemand a estimé qu’une telle demande « était recevable » et justifiait le « maintien en détention » de Carles Puigdemont en raison du « risque de fuite » en cas de remise en liberté. L’ancien président catalan, destitué par le gouvernement de Madrid après la vaine déclaration unilatérale d’indépendance de la Catalogne le 27 octobre, a été interpellé fin mars dans le nord de l’Allemagne. Il revenait d’un déplacement en Finlande, en voiture, pour retourner en Belgique où il s’est installé pour échapper à la justice espagnole suite à l’échec de la déclaration d’indépendance. Depuis, il est détenu dans la ville allemande de Neumünster, dans le nord du pays.
La décision finale quant à son extradition doit encore être prise par le tribunal allemand de Schleswig. Ce dernier a réagi mardi aux réquisitions du parquet en soulignant qu’aucune date n’était encore fixée pour son jugement, la justice allemande disposant de 60 jours pour statuer. Le tribunal a réaffirmé dans un communiqué avoir l’intention d’examiner si la demande d’extradition n’est pas « irrecevable sur le fond » et si un motif à l’incarcération existe bien. De manière significative, le parquet a pour sa part repris à son compte dans ses réquisitions les deux principales accusations de la justice espagnole, estimant qu’elles étaient valables au regard du droit allemand.
Jusqu’à 30 ans d’incarcération encourus
Carles Puigdemont est poursuivi dans son pays à la fois pour « détournements de fonds » publics pour avoir organisé un référendum jugé illégitime par Madrid, dont le coût a été estimé par la justice espagnole à 1,6 millions d’euros, mais surtout pour « rébellion ». Une incertitude subsiste sur le fait de savoir si la justice allemande va reconnaître au bout du compte le chef d’inculpation de rébellion qui stricto sensu n’existe pas dans le droit allemand. C’est l’espoir des partisans du l’ancien président catalan.
Le parquet a donné une possible indication de la direction vers laquelle penchent les magistrats allemands. Il a jugé dans son analyse que l’accusation de « rébellion » se rapprochait de celle de « haute trahison » figurant dans le code pénal national et qu’une équivalence exacte n’était pas nécessaire pour procéder à une extradition. Ce qualificatif peut selon lui être retenu du simple fait que les organisateurs du référendum d’indépendance de la Catalogne l’ont fait en dépit de l’opposition de la Cour constitutionnelle espagnole et des risques avérés que cela pouvait engendrer des violences. Malgré ces avertissements, « le gouvernement autonome catalan, y compris son président aujourd’hui poursuivi, ont décidé d’organiser le référendum », souligne le parquet allemand.
Pour éviter une extradition sous ce chef d’inculpation, passible de peines allant jusqu’à 30 ans d’incarcération en Espagne, Carles Puigdemont avait présenté lundi en Espagne un recours contre son inculpation pour « rébellion », soulignant l’absence de violence dans ses actes.
Le Quotidien/AFP