La page Angela Merkel va être tournée ce dimanche lors d’un scrutin plus indécis que jamais qui laisse augurer de longs mois de négociations pour former un nouveau gouvernement.
L’inconnu après 16 ans de stabilité : le départ d’Angela Merkel, au pouvoir depuis 2005, ouvre une nouvelle ère politique en Allemagne. C’est la première fois depuis 1949 que le chancelier sortant ne se représente pas.
Quelle majorité succèdera donc à la coalition centriste entre conservateurs démocrates-chrétiens CDU/CSU et sociaux-démocrates du SPD ? Jamais l’incertitude n’a été aussi grande dans ce pays jusqu’à récemment habitué au bipartisme. La sensibilité croissante aux enjeux climatiques tout comme la radicalisation d’une frange de la population autour de la politique migratoire ont fait émerger deux autres partis, les Verts et l’extrême droite AfD. Résultat : les deux grands mouvements, et notamment la CDU, ont vu fondre leur électorat.
Les sociaux-démocrates (SPD) sont en tête avec quelque 25% des intentions de vote, talonnés par le camp conservateur (CDU/CSU), crédité de 21 et 23% des suffrages. Les Verts, à l’issue d’une campagne jugée décevante, obtiendraient quant à eux 15% des intentions de vote en s’adjugeant la troisième place, devant le parti libéral (12%). Un duel serré entre le favori des sondages social-démocrate Olaf Scholz et son rival de droite Armin Laschet est annoncé.
Laschet et la CDU/CSU plaident pour la stabilité
«Pour que l’Allemagne reste stable, Armin Laschet doit devenir chancelier fédéral», a clamé Angela Merkel vendredi lors d’un meeting de son parti à Munich. Après s’être tenue en retrait de la campagne, la chancelière ne ménage plus ses efforts pour soutenir le chef de son parti, fragilisé par son manque de popularité et ses faux pas. Elle sera encore à ses côtés ce samedi pour un tout dernier rassemblement dans le fief d’Armin Laschet, à Aix-la-Chapelle.
Une nouvelle mise en garde a été lancée contre le scénario d’un coup de barre à gauche en cas d’alliance entre le SPD, les Verts et le parti de la gauche radicale Die Linke. Cette coalition n’est toutefois pas la plus probable et se heurte à de nombreuses divergences idéologiques entre les trois partis. Mais les conservateurs, en difficulté dans les sondages, ont fait de cette perspective un chiffon rouge pour remobiliser leurs troupes.
La chancelière a notamment critiqué les hausses d’impôts prévues par le candidat social-démocrate, disant craindre qu’elles ne fassent fuir les entreprises allemandes en Autriche ou aux Pays-Bas. «Ce n’est pas notre politique», a-t-elle souligné, préférant une «politique qui permet aux entreprises de rester chez nous et de créer des emplois ici, pour que l’Allemagne puisse prospérer». La chancelière a également mis en garde contre «la suppression du frein à l’endettement», règle constitutionnelle de rigueur budgétaire, et les risques d’une «Union européenne de la dette», que pourrait amener, selon elle, une victoire de la gauche.
Scholz et le SPD veulent un renouveau
Mobilisant ses supporters à Cologne, le candidat du SPD Olaf Scholz a lui promis d’incarner le «renouveau» après quatre mandats et 16 ans de pouvoir d’Angela Merkel, dont il est ministre des Finances depuis 2018. «Nous avons besoin d’un changement de gouvernement et nous voulons un gouvernement dirigé par le SPD», a clamé ce centriste, qui a pourtant joué sur son expérience de gestionnaire, dans la lignée d’Angela Merkel, pour faire campagne.
Portés par les préoccupations climatiques des électeurs, les Verts devraient jouer un rôle central dans le futur gouvernement. Leur candidate Annalena Baerbock obtiendrait pourrait s’adjuger, selon les sondages, la troisième place du scrutin, devant le parti libéral emmené par Christian Lindner. Elle s’est jointe vendredi à la manifestation pour le climat organisée à Cologne avant de boucler sa campagne non loin de là, à Düsseldorf.
Dans leurs programmes électoraux, les trois principaux candidats ont fait de la protection de l’environnement l’une de leurs priorités pour les quatre prochaines années, s’engageant à agir pour limiter le réchauffement climatique mondial à 1,5°C. Pendant la campagne électorale, à la mi-juillet, l’Allemagne a été frappée par des inondations meurtrières, qui ont fait plus de 180 morts dans l’ouest du pays et sont directement liées au changement climatique, selon les experts.
L’objectif de neutralité climatique fait consensus entre les partis allemands, tout comme le développement des énergies renouvelables. Mais les délais et moyens pour y parvenir font débat, entre la gauche favorable à une large intervention de l’État et la droite qui mise sur le secteur privé.
LQ/AFP