Lorgnant sur le colossal programme de travaux publics en préparation aux États-Unis, le groupe franco-suisse LafargeHolcim se dit prêt à vendre son ciment pour le mur anti-clandestins promis par Donald Trump, assure son PDG.
Ce projet à la frontière entre les États-Unis et le Mexique, évalué à plusieurs dizaines de milliards de dollars, est au centre d’une crise diplomatique entre Mexico et Washington et suscite des critiques à travers le monde. « Nous sommes prêts à fournir nos matériaux de construction pour tous types de projets d’infrastructures aux États-Unis », déclare Eric Olsen, le patron du géant du ciment, interrogé sur sa possible participation à ce chantier controversé. « Nous sommes le premier cimentier aux États-Unis (…). Nous sommes ici pour soutenir la construction et le développement du pays », justifie le dirigeant.
Questionné sur les éventuelles conséquences sur la réputation du groupe, Eric Olsen insiste sur le fait que LafargeHolcim ne fait pas de politique. « Nous sommes ici pour servir nos clients et répondre à leurs besoins. Nous ne sommes pas une organisation politique », défend le grand patron. « Nous n’avons pas d’opinion politique », martèle-t-il, refusant par ailleurs de s’exprimer sur le financement indirect par Lafarge en 2013 et 2014 de groupes armés en Syrie, pays déchiré par un long conflit, pour maintenir en activité une des ses cimenteries.
Mais jeudi le ministre français des Affaires étrangères Jean-Marc Ayrault a appelé LafargeHolcim à « bien réfléchir », avant de vendre son ciment « parce qu’il y a d’autres clients dans le monde qui vont regarder cela avec une certaine stupéfaction ». « Je rappelle que les entreprises (…) ont aussi une responsabilité sociale et environnementale », a prévenu le chef de la diplomatie française à la radio Franceinfo.
1 000 milliards de dollars d’investissements promis
Si les positions du groupe sont de nature à lui valoir une mauvaise publicité et des remontrances des politiciens, notamment en Europe, l’impact matériel serait, lui, négligeable, car LafargeHolcim ne vend pas directement son ciment aux consommateurs. Il est ainsi à l’abri d’un potentiel boycott populaire comparable à celui subi par Uber après sa réaction timide au premier décret anti-immigration pris par le président américain fin janvier.
Également présent aux Etats-Unis, le cimentier irlandais CRH a pour sa part déjà fait savoir qu’il ne fournirait pas ses matériaux pour la construction du mur du président Trump, qui a signé le décret de lancement du projet de construction le 25 janvier. Les enjeux sont importants pour LafargeHolcim, né en 2015 de la fusion entre les cimentiers français Lafarge et suisse Holcim. L’entreprise espère être un des grands gagnants du programme d’investissements de 1 000 milliards de dollars promis par Donald Trump pour rénover les infrastructures américaines (ponts, tunnels, routes, aéroports). Ce plan, dont l’annonce est imminente, devrait inclure la construction du mur frontalier, croit savoir la presse américaine.
Le Quotidien/AFP