La Turquie a fermement défendu jeudi son engagement « incontesté » contre les jihadistes en réponse aux accusations de complaisance lancées par la Russie et exclu de s’excuser auprès d’elle pour avoir abattu un de ses avions militaires à la frontière syrienne.
Lors d’un discours à Ankara, le président islamo-conservateur Recep Tayyip Erdogan a catégoriquement démenti que son pays laissait transiter ou bénéficiait des ventes de pétrole du groupe Etat islamique (EI). « Ceux qui nous accusent d’acheter du pétrole à Daech (acronyme arabe de l’EI) ont l’obligation de prouver leurs allégations. Si non, vous êtes des calomniateurs », a lancé M. Erdogan devant des élus locaux.
« Daech vend le pétrole qu’il extrait à Assad », a-t-il ajouté en référence au président syrien Bachar al-Assad, « parlez de ça avec Assad que vous soutenez ».
Ankara et Moscou s’opposent sur le dossier syrien. Les Turcs ont fait du départ de M. Assad la condition sine qua non de toute solution politique au conflit, alors que les Russes constituent, avec l’Iran, son dernier soutien. Leurs relations se sont considérablement tendues depuis l’incident aérien de mardi.
La Turquie affirme avoir abattu le Sukhoï Su-24 parce qu’il violait son espace aérien, après l’avoir mis en garde à dix reprises. La Russie assure au contraire que son avion n’a pas pénétré côté turc et qu’il n’a jamais été contacté avant d’être abattu.
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Furieuse, la Russie, le président Vladimir Poutine en tête, accuse depuis la Turquie d’avoir partie liée avec l’EI et exige des excuses. Le ministre turc des Affaires étrangères Mevlüt Cavusoglu l’a totalement exclu.
« Il n’y a pas de raison que la Turquie s’excuse pour une situation où elle a raison. Nous avons communiqué (à Moscou) notre tristesse quant à cet incident », a-t-il indiqué lors d’un déplacement dans la partie nord de l’île de Chypre. Sur un ton très martial, M. Erdogan a insisté jeudi sur son engagement contre l’EI.
« Notre combat contre Daech se poursuit de manière active et ininterrompue (…) la Turquie est quasiment le seul pays qui lutte sincèrement contre Daech », a-t-il même assuré, « il n’y a pas de question à ce sujet ».
Une nouvelle fois, M. Erdogan a démenti en vouloir à la Russie et justifié la réaction militaire de son pays par la stricte application de ses « règles d’engagement ». « Il n’y a aucune raison pour que nous ciblons (délibérément) la Russie avec qui nous avons des liens très forts (…) Nous serons amenés à réagir de la même manière si cet incident survenait aujourd’hui », a-t-il encore insisté.
M. Erdogan s’est déclaré « attristé » par l’incident et par les menaces de rétorsion économique de la partie russe. « Nous sommes des partenaires stratégiques », a-t-il relevé. Il a enfin raillé les propos de M. Poutine qui l’avait accusé d’avoir islamisé la Turquie. « Tayyip Erdogan et 99% de la population turque sont musulmanes », s’est-il amusé, « et si moi je disais que l’administration russe est en train de christianiser la Russie ? »
AFP