La Tunisie a commémoré vendredi son indépendance dans le deuil, deux jours après l’attentat revendiqué par le groupe Etat islamique contre des touristes au musée du Bardo à Tunis, dont les auteurs se sont entraînés en Libye selon les autorités.
Le président tunisien Beji Caid Essebsi lors de la commémoration de l’indépendance du pays, le 20 mars 2015 à Tunis. (Photo : AFP)
Le président Béji Caïd Essebsi s’est de nouveau adressé en soirée à la nation à l’occasion du 59e anniversaire de l’indépendance, après avoir promis une lutte « sans pitié contre le terrorisme ». « Le premier défi est celui de la sécurité », a-t-il lancé en appelant à « l’union nationale ».
Selon des journalistes de l’AFP, une centaine de personnes ont manifesté le matin « contre le terrorisme » dans le centre de Tunis et quelques centaines sur l’île de Djerba (sud), haut lieu du tourisme, alors que l’attaque contre le plus prestigieux musée du pays a porté un coup à ce secteur vital de l’économie.
En visite à Tunis, le ministre français de l’Intérieur Bernard Cazeneuve, reçu par le président Essebsi, a de nouveau exprimé la solidarité de Paris dans le « combat contre toutes les formes de barbarie ». Il a également déposé une gerbe à l’entrée du musée et rendu visite à des blessés français. Dans le même temps, le président François Hollande a confirmé la mort d’un troisième Français dans l’attentat.
Après l’identification par le ministère de la Santé vendredi soir des corps de deux Polonais, portant à trois le total des ressortissants polonais tués, un corps reste à identifier. Moscou a fait état d’une victime russe, ce que Tunis n’a pas confirmé. Revendiquée par l’EI, cette attaque sans précédent depuis la révolution de 2011 a coûté la vie à 20 touristes étrangers et un policier tunisien.
De nouveaux témoignages ont été donnés vendredi depuis l’Espagne, où est arrivé le paquebot MSC Splendida dont 12 passagers sont morts à Tunis. « Ils se sont mis à tirer sur les touristes. Ils tiraient sur tous ceux qu’ils rencontraient, sans pitié », a raconté Josep Lluis Cusido, maire d’un village catalan.
> Eléments suspects
Les deux assaillants, qui ont tiré à la Kalachnikov sur les victimes alors qu’ils descendaient de leurs cars, s’étaient formés au maniement des armes en Libye, a indiqué le secrétaire d’Etat aux affaires sécuritaires Rafik Chelly. Il s’agit de « deux éléments extrémistes salafistes » qui avaient « quitté clandestinement le pays en décembre » pour ce pays voisin en proie au chaos, a-t-il ajouté.
M. Chelly a précisé que les deux jeunes hommes abattus par la police faisaient partie de « de ce qu’on appelle les cellules dormantes ». L’un d’eux, Yassine Abidi, avait été arrêté avant son départ en Libye. L’AFP a appris vendredi auprès de la police et de la famille de l’autre assaillant, Jabeur Khachnaoui, que le père, les deux frères et la sœur de ce dernier avaient été interpellés, sans que l’on sache s’ils sont comptabilisés dans les neuf arrestations annoncées la veille.
Revendiquant l’attentat jeudi dans un message sonore, l’EI a menacé la Tunisie d’autres actions. Répondant aux interrogations sur un éventuel retour à l’autoritarisme dans le cadre de la lutte antiterroriste, le président Essebsi a assuré jeudi que « le processus de mise en place du système démocratique est déjà bien ancré ».
> Failles
Il a aussi salué « la promptitude » des forces de l’ordre. Le ministre de L’Intérieur Najem Gharsalli a lui assuré que ses troupes ont réussi « à éviter une véritable catastrophe, parce que se trouvaient dans le musée au moment de l’attaque environ 300 personnes ». Mais le chef du gouvernement Habib Essid a reconnu des « failles », alors que quelques mètres séparent le musée du siège du Parlement où se tenait au moment de l’attaque une réunion sur la réforme de la loi antiterroriste.
Le vice-président de l’Assemblée, Abdelfattah Mourou, a affirmé à l’AFP que, mercredi, « il n’y avait pas de police autour du Parlement et du musée ». « J’ai appris qu’il y avait quatre policiers seulement qui devaient assurer la sécurité autour du Parlement, dont deux étaient au café. Le troisième mangeait un casse-croûte et le quatrième ne s’est pas présenté », a-t-il déploré.
Il s’agit de la première opération revendiquée par l’EI en Tunisie, mais ce groupe compte des centaines de combattants tunisiens dans ses rangs. Le président du Conseil européen Donald Tusk et la chef de la diplomatie de l’UE Federica Mogherini ont annoncé qu’ils se rendraient en Tunisie le 31 mars pour renforcer la coopération, notamment sécuritaire.
AFP