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La tactique de déconfinement de la France dans la dernière ligne droite


Le premier ministre français doit prendre la parole mardi. Le plan concernant la rentrée scolaire est par exemple trop flou encore (Photo : AFP).

Le gouvernement français a multiplié ces derniers jours les consultations pour peaufiner son périlleux plan de déconfinement, en particulier avec les élus locaux, et planche lundi sur les ultimes arbitrages à la veille de sa présentation officielle devant les députés.

L’enjeu est de taille puisqu’il s’agit de déterminer les conditions dans lesquelles l’activité et la vie quotidienne des Français vont pouvoir redémarrer à partir du 11 mai, date choisie par l’exécutif pour le déconfinement progressif du pays.

Mais pour Olivier Faure, premier secrétaire du PS, « rien n’est prêt » pour cette échéance.

« La réalité, c’est que le plan du gouvernement n’est pas encore prêt, que rien n’est prêt pour le 11 mai, y compris sur l’application ‘Stop Covid’, et que nous aurons à voter sur des généralités » lors de la présentation mardi, a-t-il déclaré dimanche soir sur BFMTV.

Il a demandé à ce que les députés puissent voter sur ce plan uniquement « lorsque nous aurons l’intégralité des solutions proposées », afin que « nous ayons la possibilité de voter en conscience ».

Car à l’issue de la présentation de la « stratégie nationale du plan de déconfinement » par le Premier ministre Edouard Philippe mardi après-midi à l’Assemblée nationale, un débat puis un vote sont prévus.

Sa déclaration doit être couplée avec celle, déjà prévue auparavant, sur la question du traçage et de l’application « Stop Covid ».

C’est un véritable exercice d’équilibriste auquel le gouvernement doit se livrer: relancer l’économie sans relancer l’épidémie.

Le tout dans un contexte de défiance: les Français ne sont que 39% à lui faire confiance pour faire face efficacement au coronavirus, soit sept points de moins en une semaine, selon un sondage Ifop pour le JDD.

Tous azimuts

Sans doute la raison pour laquelle des consultations tous azimuts se sont déroulées pour faire les arbitrages.

Les maires ont ainsi été reçus par le président Emmanuel Macron jeudi, les régions et départements par Edouard Philippe jeudi et vendredi.

L’objectif est de « co-construire » ce plan avec élus, syndicats et patronat, a assuré le Premier ministre dimanche sur Twitter.

« Nous présenterons ensuite cette stratégie (…) aux associations d’élus locaux et aux partenaires sociaux, pour que s’engage une période de co-construction du plan national et de ses déclinaisons territoriales », a affirmé le chef du gouvernement, chargé de mettre en musique le déconfinement annoncé mi-avril par Emmanuel Macron.

Le chef de file des députés La France insoumise Jean-Luc Mélenchon a dénoncé dimanche « l’imposture » et « la méthode insupportable » du gouvernement qui ne laisse « aucun temps d’examen critique » du plan de déconfinement.

Des députés LR ont aussi demandé un report du vote afin de laisser « un temps de réflexion » aux parlementaires.

Cela fait presque six semaines que le pays est confiné pour freiner la propagation du nouveau coronavirus qui, selon le dernier bilan dimanche soir, a fait depuis le 1er mars 22.856 morts dans le pays, dont 242 nouveaux décès en 24 heures.

La situation dans les hôpitaux s’améliore encore un peu avec 152 décès en 24 heures –bilan quotidien le plus faible en cinq semaines– et une baisse continue depuis dix-huit jours des patients en réanimation pour Covid-19 (4.682 personnes).

Mais les services de réanimation/soins intensifs –qui comptaient 5.000 lits avant la crise– restent sous pression avec encore 7.553 hospitalisés, toutes causes confondues.

A deux semaines du début du déconfinement, les questions sont nombreuses : où rendre les masques obligatoires ? Quels tests et pour qui? Réouverture des commerces partout ou par régions ? Quid des entreprises ? Et les vacances d’été ?

Le Conseil scientifique chargé d’éclairer le gouvernement a livré samedi soir ses recommandations pour une « levée progressive et contrôlée du confinement ».

Le Conseil scientifique contre la rentrée en mai

Divergence notable avec les choix gouvernementaux, il préconise que crèches et établissements scolaires restent fermés jusqu’en septembre mais a pris « acte de la décision politique » de les rouvrir progressivement dès mai, en « prenant en compte les enjeux sanitaires mais aussi sociétaux et économiques ».

« Le conseil scientifique est là pour donner un certain nombre d’informations mais c’est le pouvoir politique qui décide », a expliqué son président, Jean-François Delfraissy. Les préconisations doivent permettre d' »organiser au mieux quelque chose de très difficile », dit-il.

Pour la rentrée scolaire, qui doit être progressive, le conseil préconise notamment le port obligatoire d’un masque anti-projections dans les collèges et lycées, pour le personnel comme pour les élèves.

Les experts suggèrent aussi le déjeuner en classe, la prise de température à la maison chaque matin avant l’école et des stratégies dans les établissements pour éviter les brassages d’élèves. Mais ils écartent la faisabilité et l’intérêt d’un dépistage massif.

« Avec cette note du Conseil scientifique, nous avons la base pour l’élaboration du protocole sanitaire annoncé pour donner un cadre sûr au déconfinement scolaire », a jugé Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Education nationale.

« Mission impossible », a rétorqué Philippe Vincent, secrétaire général du SNPDEN, premier syndicat des chefs d’établissement. « La somme de toutes les préconisations du Conseil, si elles étaient retenues, est infaisable dans l’état actuel de nos capacités, avec du personnel qui ne sera certainement pas présent à 100% », craint-il.

Au-delà des questions scolaires, le Conseil scientifique préconise d’autoriser les déplacements entre régions par transports en commun si les mesures de précaution sont respectées. Il déconseille cependant « fortement » les déplacements internationaux pendant encore quelques mois.

Les deux prochains rapports du Conseil devraient porter sur les critères de suivi et d’alerte des cas de Covid-19 et sur l’organisation des vacances et de la rentrée de septembre.

AFP