Le commissaire européen aux Migrations, le Grec Dimitris Avramopoulos, est attendu jeudi en Slovénie pour évaluer les besoins de ce petit pays des Balkans qui se trouve à son tour en première ligne et s’est dit «dépassé» par l’arrivée de milliers de migrants.
L’Union européenne est appelée à l’aide par Ljubljana: avec l’installation de clôtures antimigrants par la Hongrie, la Slovénie est devenue, avec la Serbie et la Croatie, l’un des principaux pays de transit des réfugiés vers le nord de l’Europe et elle tente, avec difficulté, d’organiser leur transit sur son territoire.
Le défi est de taille : la police slovène a annnoncé jeudi matin que 12.676 migrants étaient rentrés en 24 heures dans ce petit pays de deux millions d’habitants, un record dépassant même ceux enregistrés en Hongrie au plus fort de la crise en septembre.
Le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a reconnu «les problèmes énormes (…) presque existentiels» qu’affronte «l’un des Etats membres les plus exigus de l’UE». Au total, la Slovénie a dénombré 34 131 arrivées de migrants depuis samedi, jour où le flux a commencé à se rediriger vers ce pays, porte d’entrée de la zone Schengen.
Jeudi matin, plus de 10 000 d’entre eux étaient accueillis dans les camps prévus à cet effet en attendant de pouvoir continuer leur route vers l’Autriche, frontière nord de la Slovénie. Et de 2 000 à 3 000 migrants attendaient déjà à la frontière croate de pouvoir à leur tour entrer en Slovénie, selon la police.
Un mini-sommet a été convoqué avec les dirigeants des pays européens confrontés à l’exode persistant de milliers de migrants et réfugiés. Les chefs d’Etat et de gouvernement d’Autriche, de Bulgarie, de Croatie, d’Allemagne, de Grèce, de Hongrie, de Roumanie, de Macédoine, de Serbie et de Slovénie se retrouveront dimanche à Bruxelles pour tenter de coordonner leur action face à une «situation d’urgence» dans les Balkans, a indiqué la Commission européenne.
L’affluence dans les centres slovènes rendait la situation précaire. A Brezice, près de la frontière croate, un feu d’origine inconnu a détruit 27 tentes collectives, soit la majorité des hébergements du camp prévu pour 400 migrants, et qui en a reçu jusque 4 000 ces derniers jours.
Rapidement maîtrisé, l’incendie n’a pas fait de blessé mais a provoqué un début de panique. Des brasiers de fortune sont allumés par les migrants pour se réchauffer, mais aussi pour protester contre l’attente, selon les médias slovènes.
La tension est également brièvement montée à la frontière avec l’Autriche que plus d’un millier de personnes ont traversée à pied, en lieu et place des autobus prévus, croyant sans doute, selon l’hypothèse de la police, être arrivées en Allemagne.
L’Allemagne a dit ne pas exclure le recours à des avions militaires afin d’expulser les migrants ne répondant pas aux critères du statut de réfugié.
Après avoir fait voter une extension des prérogatives de l’armée permettant aux soldats d’aider la police sur les 670 km de frontière bordant la Croatie et délimitant l’espace Schengen, le gouvernement slovène souhaite amender la loi pour pouvoir mobiliser les policiers à la retraite.
« Europe qui se nombrilise »
«Police et protection civile sont aux limites de leurs capacités», selon le porte-parole du gouvernement Bojan Sefic. A la porte d’entrée de l’UE, en Grèce, où des milliers de migrants accostent sur des embarcations de fortune depuis les côtes turques, le nombre d’arrivées a connu une nouvelle accélération ces derniers jours.
Selon l’ONU, quelque 502 000 personnes ont emprunté cette route depuis janvier, soit la grande majorité des entrées de migrants dans l’UE (643 000 au total). Et la Turquie dit se préparer à un nouvel afflux de réfugiés à sa frontière avec la Syrie après l’offensive menée dans le nord du pays par les forces du régime appuyées par l’aviation russe.
L’UE, confrontée à la pire crise migratoire depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, est divisée sur la façon de répondre à cet exode. Illustration de ces divisions: les partis conservateurs de l’Union européenne réunis mercredi et jeudi à Madrid ont appelé au renforcement des frontières extérieures de l’Europe.
«Nous ne pouvons pas accepter l’ensemble de la misère du monde», a plaidé Joseph Daul, président du Parti populaire européen qui regroupe ces partis conservateurs.
Au même moment, Jean-Claude Juncker dénonçait «une Europe qui se +nombrilise+, (…) qui se ferme aux espoirs et à l’attente des autres», avouant même «presque de pleurer» devant le «long cortège de réfugiés qui rappelle les images de la fin de la deuxième guerre».
AFP/M.R.