La Première ministre britannique Theresa May semblait se rapprocher jeudi d’un accord de gouvernement avec les Nord-Irlandais du DUP qui lui permettrait de se remettre en selle, après son revers aux législatives, au moment d’entamer les négociations sur le Brexit.
Avec un score très en deçà de ses espérances aux législatives du 8 juin, la Première ministre conservatrice est dans l’obligation de trouver un accord avec le DUP, dont les dix élus lui permettraient d’atteindre les 326 sièges requis pour retrouver une majorité absolue à la chambre des Communes. Dans un signe suggérant, selon le Guardian et The Independent, que le gouvernement « doit être confiant quant à la finalisation d’un accord avec le DUP », la leader de la chambre des Communes Andrea Leadsom a annoncé jeudi que la reprise parlementaire aurait lieu le 21 juin. Soit avec un retard de deux jours.
Downing Street n’a pas voulu confirmer si cette annonce signifiait qu’un accord avait effectivement été bouclé, mais une source au sein des conservateurs s’est dit « confiante » de voir le gouvernement passer le vote de confiance au Parlement. Entamées depuis plusieurs jours, ces discussions sont passées au second plan mercredi en raison du terrible incendie qui a ravagé à Londres un immeuble de logements sociaux, faisant 17 morts selon un bilan provisoire.
L’ampleur du sinistre et les suspicions de négligence qui pèsent sur le gestionnaire du bâtiment ont choqué l’opinion, comme la classe politique. « Le drame de Grenfell (nom de la tour, ndlr) doit être notre priorité », a tweeté la leader du DUP Arlene Foster. La responsable nord-irlandaise est rentrée à Belfast, laissant à son équipe le soin de « poursuivre » les pourparlers.
Le temps presse pour Theresa May, dont le crédit s’est effondré depuis les élections et qui va devoir entamer amoindrie les difficiles négociations sur la sortie de l’Union européenne, censées commencer lundi, presque un an après le référendum du 23 juin 2016. Elle avait pourtant convoqué ce scrutin anticipé pour, avait-elle argumenté, avoir les coudées franches pour discuter avec Bruxelles. Se voulant rassurante, alors que des responsables européens montrent des signes d’impatience, elle a assuré que le calendrier serait « maintenu » et que les discussions commenceraient bien « la semaine prochaine ».
Tensions en Irlande du Nord
Les négociations avec le DUP sont également loin d’être de tout repos: la perspective d’une alliance avec ce petit parti ultra-conservateur, opposé au mariage homosexuel et à l’avortement, inquiète au Royaume-Uni comme en Irlande. Une réunion prévue jeudi après-midi à Downing Street avec les cinq principaux partis nord-irlandais doit officiellement porter sur le gouvernance locale en Irlande du Nord, mais il semble improbable que l’accord de gouvernement ne soit pas évoqué.
Signe des tensions, Michelle O’Neill, la dirigeante du Sinn Fein, formation historique des nationalistes catholiques, a mis en garde contre un accord qui « saperait l’accord du Vendredi saint », qui a mis fin en 1998 à 30 ans de violences dans la province britannique. Une alliance entre le DUP et le gouvernement poserait en effet la question de la neutralité de l’exécutif britannique en Irlande du Nord. « Le risque, c’est que l’Irlande du Nord continue sur la mauvaise pente et le processus de paix en pâtisse », a souligné Simon Usherwood, de l’université du Surrey.
Mmes May et Foster pourraient également devoir accorder leurs points de vue sur le Brexit. Theresa May a en effet prôné jusqu’ici un Brexit « dur », impliquant notamment une sortie du marché unique, tandis que le DUP veut éviter le retour d’une frontière physique avec l’Irlande, membre de l’UE. Theresa May affaiblie, sa ligne fait l’objet d’attaques redoublée depuis la semaine dernière, notamment dans la City, et le ministre des Finances, Philip Hammond, devait prononcer jeudi soir un discours très attendu dans la communauté financière. Philip Hammond, qui peinait à faire entendre sa petite musique favorable à une approche plus modérée du Brexit depuis le référendum, pourrait utiliser cette occasion pour insister sur l’importance de tenir compte des besoins des milieux d’affaires dans les négociations avec Bruxelles.
Le Quotidien/AFP