La lave du volcan entré en éruption il y a dix jours sur l’île de La Palma, dans l’archipel espagnol des Canaries, a finalement atteint l’océan dans la nuit de mardi à mercredi, un phénomène redouté des experts, car potentiellement dangereux.
L’évènement a été annoncé peu après 23H00 heure locale (mardi 22H00 GMT) par l’Institut volcanologique des Canaries (Involcan). « La coulée de lave a atteint la mer à Playa Nueva », a indiqué Involcan sur son compte Twitter.
Les images diffusées par la télévision régionale des Canaries, un archipel espagnol situé au large des côtes nord-ouest de l’Afrique, montraient la lave incandescente pénétrer dans l’eau au milieu d’une grande quantité de fumée. Le volcan Cumbre Vieja était entré en éruption le 19 septembre.
Mardi après-midi, la lave, dont la vitesse avait beaucoup varié au cours des derniers jours, au point même de s’immobiliser à un moment donné, se trouvait encore à quelque 800 mètres de la mer, ce qui rendait impossible de prévoir quand elle atteindrait l’océan.
Cette rencontre entre la lave, une roche fondue à plus de 1.000 degrés Celsius, et une eau de mer qui avoisine les 20-25 degrés Celsius était particulièrement redoutée en raison de la production de gaz toxiques et de particules nocives qu’elle pouvait entraîner, ce qui la rend potentiellement très dangereuse. Pour cette raison, le gouvernement régional de l’archipel a décrété un « rayon d’exclusion de 2 milles marins » autour de l’endroit où était prévue l’arrivée de la lave.
Gaz toxiques
Lundi, les habitants de plusieurs quartiers de Tazacorte, un village situé près de la côte, avaient été appelés à se confiner pour se protéger contre d’éventuelles émanations de gaz toxiques résultant de l’arrivée de la lave dans l’océan. Cette décision avait été prise en raison de « la possibilité qu’il y ait un petit choc lorsque le magma pénètrera dans l’eau de mer et que ce petit choc provoque des vapeurs qui peuvent être toxiques », avait souligné le directeur technique du Plan d’urgence volcanique des Canaries (Pevolca), Miguel Ángel Morcuende.
On ne disposait pas encore d’informations sur la quantité de gaz toxiques produits et sur la dangerosité de la situation. « L’inhalation ou le contact avec des gaz et liquides acides peut irriter la peau, les yeux et les voies respiratoires, et peut causer des difficultés pour respirer », a cependant averti Involcan.
L’entrée de la couvée de lave dans la mer est survenue quelques heures après que le gouvernement eut débloqué mardi 10,5 millions d’euros d’aides directes aux victimes de l’éruption, afin notamment d’acheter des logements pour les personnes dont la maison a été engloutie par la lave.
L’état de catastrophe naturelle a été déclaré sur cette île de 85.000 habitants, où les coulées de lave ont au total détruit 656 bâtiments – qui ne sont pas tous des habitations – et recouvert 268 hectares de terrain, selon le système européen de mesures géospatiales Copernicus. La lave a aussi détruit de nombreuses routes. Le président de la région des Canaries, Angel Victor Torres, estimait dès la semaine dernière que les dégâts dépasseraient les 400 millions d’euros et indiquait qu’il compter sur des fonds européens pour reconstruire. L’éruption n’a fait aucun mort ni blessé, mais a entraîné l’évacuation de plus de 6.000 personnes qui ont dû abandonner leur domicile.
Depuis qu’il est entré en éruption, le volcan crache d’énormes colonnes de fumée atteignant plusieurs centaines de mètres de haut, mais également des cendres. L’accumulation de celles-ci a perturbé le trafic aérien, provoquant vendredi l’annulation des sept vols intérieurs prévus, puis la fermeture le lendemain de l’aéroport. Bien qu’il ait officiellement rouvert, les vols restent pour l’instant suspendus.
Les experts estiment que l’éruption pourrait durer plusieurs semaines, voire même quelques mois. Les deux précédentes éruptions à La Palma ont eu lieu en 1949 et 1971. Elles avaient fait au total trois morts, dont deux par inhalation de gaz. Comme les autres îles de l’archipel, La Palma vit principalement de la culture des bananes et du tourisme.
LQ/AFP