Après une campagne bouleversée par l’irruption de la guerre en Ukraine, le souverainiste Viktor Orban vit son plus rude combat politique lors des législatives dimanche en Hongrie.
Face à lui, une alliance inédite de six partis, décidée à renverser « l’autoritaire » dirigeant de 58 ans.
Accusé par Bruxelles de multiples atteintes à l’État de droit, il a muselé au fil de 12 années de réformes « illibérales » justice et médias, tout en prônant une vision ultra-conservatrice de la société.
Veste noire et visage déterminé, Orban a voté avec son épouse Aniko Levai en tout début de matinée, dans une école de la banlieue de Budapest, promettant une « grande victoire ».
« C’est une élection juste et équitable », a-t-il assuré, réfutant les accusations de fraude, alors que le scrutin se tient pour la première fois sous la surveillance de plus de 200 observateurs internationaux. Chaque camp a aussi déployé de nombreux bénévoles.
« Honte nationale »
Dans un autre bureau de la capitale, Zita Becker, étudiante et aide sociale de 27 ans, disait espérer un changement, car elle ne supporte plus « l’ambiance rétrograde ». « Presque tous mes amis ont quitté la Hongrie pour aller en Europe de l’Ouest, et moi, honnêtement, j’envisage de faire la même chose si Orban reste au pouvoir ».
Il « est devenu une honte nationale dans le monde : faisons en sorte de laver cette honte du nom de la Hongrie », a lancé son adversaire Peter Marki-Zay, 49 ans, lors d’un ultime rassemblement samedi à Budapest.
Il a affiché son « espoir » même si la tâche n’est pas facile après « 12 ans de lavage de cerveau ».
Si la victoire de l’opposition semble acquise à Budapest, la bataille s’annonce plus compliquée dans les zones rurales. La clé se trouve dans 20 à 30 circonscriptions indécises, sur les 199 sièges du Parlement.
MZP a sillonné ces dernières semaines de long en large ces territoires, à l’écoute des habitants, dans l’espoir de battre en brèche la « propagande » du gouvernement.
À l’inverse, « Viktor Orban était invisible ou presque sur le terrain », souligne Andras Pulai, de l’institut de sondages Publicus proche de l’opposition. « Il a essentiellement pris part à des événements réservés à ses plus loyaux partisans », dit-il.
La dernière enquête de Publicus donne les deux camps au coude-à-coude, quand d’autres confèrent un léger avantage au Fidesz, le parti au pouvoir.
Mais du fait du système électoral, il faudrait que l’opposition « gagne de 3 à 4 points » pour décrocher une majorité au Parlement, rappelle-t-il. « Il est très difficile de prévoir l’issue du scrutin. Tout peut arriver ».
« La guerre a tout changé »
Surtout que le conflit en Ukraine voisine a totalement bousculé la donne. « La guerre a éclaté et la guerre a tout changé », a résumé Orban vendredi au cours de son unique rassemblement de campagne.
« Paix contre guerre », l’équation est simple à ses yeux. D’un côté, un gouvernement qui refuse de livrer des armes à l’Ukraine et de voter des sanctions qui priveraient les Hongrois des précieux pétroles et gaz russes. De l’autre, une opposition qui serait belliqueuse.
Si ce discours a fait mouche dans les campagnes, la proximité cultivée depuis 2010 avec « l’agresseur », Vladimir Poutine, pourrait se retourner contre lui, souligne Pulai.
En votant pour l’opposition, Maria Rapcsak, anciennce directrice commerciale de 75 ans, veut justement « mettre fin à la politique corrompue pro-Poutine d’Orban », présenté sur les pancartes des meetings comme « un mini-Poutine ».
LGBT+, un référendum « malsain »
Outre l’élection de leurs députés, les Hongrois sont appelés à répondre à quatre questions en lien avec la récente loi anti-LGBT+, interdisant d’évoquer auprès des moins de 18 ans « le changement de sexe et l’homosexualité ».
« Laissons nos enfants tranquilles et protégeons nos familles », aime répéter Orban. Les ONG ont pour leur part demandé aux électeurs d' »invalider » ce référendum « malsain » en cochant deux cases au lieu d’une.
Les bureaux de vote, ouverts à 06 heures, ferment à 19 heures. Mais les résultats pourraient ne tomber qu’à minuit, selon le gouvernement, alors qu’une importante mobilisation est attendue, au-delà de 70%.