Le nouveau gouvernement italien dirigé par Giorgia Meloni compte ressusciter le chantier pharaonique du pont sur le détroit de Messine, reliant la Sicile à l’Italie continentale, qui avait été enterré en 2011 par l’exécutif de Silvio Berlusconi.
A l’initiative du ministre des Transports et des Infrastructures Matteo Salvini, le conseil des ministres a approuvé lundi soir la réactivation de la société « Stretto di Messina » (Détroit de Messine), chargée de la réalisation du projet et mise en liquidation en 2013. « Il ne s’agit pas d’une infrastructure sicilienne ou calabraise » mais ce pont « peut et doit être un joyau au niveau planétaire », avait déclaré M. Salvini mercredi lors d’une conférence en ligne consacrée à ce sujet.
« Techniquement, ce ne sera pas facile, le plan économique et financier doit être revu et le projet actualisé », a-t-il déclaré, estimant que les travaux pourraient commencer dans deux ans.
Parmi les options sur la table, le dirigeant de la Ligue (anti-immigration) a cité la reprise de l’ancien projet ou alors le lancement d’un nouvel appel d’offres. Le Parlement italien avait voté en octobre 2011 une motion mettant un terme au financement public de 1,77 milliard d’euros du chantier controversé du pont. Le gouvernement Berlusconi aux prises avec une crise financière qui l’a contraint à des mesures d’austérité draconiennes avait donné son accord à ce vote.
Ce pont, d’un coût prévu de 6 milliards d’euros, devait s’étendre sur près de 3,7 km de long et se situer à 64 mètres au-dessus de la mer. La Commission européenne avait exclu en octobre 2011 ce pont des ouvrages considérés prioritaires et stratégiques pour le développement des transports dans l’UE.
Jeudi, M. Salvini a expliqué au cours d’une conférence de presse qu’il demandera quand même un co-financement européen lors de la prochaine réunion, le 5 décembre à Bruxelles, des ministres des Transports de l’UE. « Ces travaux » concernant le pont « intéressent toute l’Europe et (…) je demanderai que cette infrastructure stratégique, ce couloir continental stratégique, ait un co-financement européen », a déclaré M. Salvini. L’idée de relier la Sicile au reste du continent est vieille de plusieurs décennies mais elle peinait à trouver une solution viable.
Le projet de pont avait été relancé par le précédent gouvernement Berlusconi élu en 2001, puis annulé par le gouvernement de centre gauche de Romano Prodi en 2006. Le groupe italien de construction Webuild (ex-Salini Impregilo) avait remporté en 2005 l’appel d’offres pour être le maître d’oeuvre du chantier avec un devis de 3,9 milliards d’euros, avant de voir le projet enterré.
La Commission européenne avait engagé en octobre 2005 une procédure contre l’Italie, l’accusant notamment de ne pas avoir fait « d’analyse d’impact environnemental » de la construction du pont pour les quelque 300 espèces d’oiseaux sauvages présents dans le détroit. Des géologues avaient mis en garde contre la vulnérabilité du pont face à l’importante activité sismique dans cette région.