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Irak : trois attentats de l’EI font au moins 94 morts


Des Irakiens regardent les dégâts causés par un voiture piégée à Sadr City, un quartier chiite de Bagdad le 11 mai 2016. (Photo : AFP)

Au moins 94 personnes ont été tuées mercredi dans trois attentats à la voiture piégée à Bagdad, dont l’un a visé un marché bondé, lors de la journée la plus meurtrière dans la capitale irakienne cette année.

Les trois attentats, qui ont également fait 150 blessés, ont été revendiqués par le groupe jihadiste sunnite État islamique (EI) qui a affirmé que trois kamikazes les avaient perpétrés. Ils ont été condamnés par l’ONU et les États-Unis et surviennent dans un contexte de grave crise politique en Irak. L’attaque la plus sanglante a eu lieu à 10h00, heure d’affluence dans une zone de marché du quartier chiite de Sadr City, dans le nord de Bagdad.

Au moins 64 personnes ont péri et 82 ont été blessées, selon des sources médicales et de sécurité. L’incendie s’est rapidement propagé à des échoppes, dont les devantures ont volé en éclats.

«Un camion a tenté d’abord de pénétrer dans le marché mais les policiers lui ont interdit de s’approcher et ont demandé au conducteur de rebrousser chemin. Mais le camion a trouvé une autre entrée et a explosé», a indiqué un témoin, Abou Ali. «Les gens et les vendeurs ici sont des civils innocents», a-t-il lancé en exprimant sa colère. Quelques heures plus tard, deux attentats à la voiture piégée ont frappé deux autres quartiers de Bagdad, selon la police.

«Les politiciens doivent partir»

A l’entrée de Kazimiyah, un quartier chiite sous haute sécurité (nord-ouest), l’attaque a tué au moins 17 personnes, selon des sources hospitalières. Plusieurs membres des forces de sécurité font partie des victimes.

Dans le quartier mixte (sunnite-chiite) de Jamea, dans l’ouest de Bagdad, 13 personnes ont péri, selon un responsable. Le groupe sunnite EI, qui occupe de vastes pans du territoire irakien, prend fréquemment pour cible la communauté chiite, majoritaire en Irak, accusée d’être hérétique.

A Sadr City, des dizaines d’Irakiens ont manifesté leur colère après l’attentat en dénonçant l’inaction des autorités face à l’EI. «Les politiciens sont responsables de l’explosion et les gens sont les victimes de leurs querelles. Les politiciens disent que l’armée et les forces de l’ordre ne font pas leur travail suffisamment bien, mais en fait ce sont eux les responsables», s’est insurgé Abou Ali.

L’Etat est «responsable» et les hommes politiques «doivent partir», a renchéri un autre habitant, Abou Mountazar. L’envoyé spécial de l’ONU pour l’Irak, Jan Kubis, a dénoncé des «attaques terroristes lâches contre des civils» à Bagdad. Les États-Unis ont eux condamné «des attentats barbares et lâches (…) qui ne feront que renforcer la résolution des Irakiens et de la communauté internationale à détruire» l’EI, selon le département d’Etat qui a appelé les dirigeants irakiens à régler rapidement leurs différends pour «poursuivre les progrès enregistrés» contre le groupe jihadiste.

14% du territoire

L’Irak est secoué par une grave crise politique. Plusieurs partis s’opposent aux plans du Premier ministre Haider al-Abadi de mettre en place un gouvernement de technocrates par peur de perdre certains de leurs privilèges. Excédés par ce blocage politique, des milliers d’Irakiens -partisans du dignitaire chiite Moqtada Sadr pour la plupart- ont organisé des sit-in et des manifestations antigouvernementales qui ont culminé il y a moins de deux semaines avec l’entrée par la force dans la Zone verte ultrasécurisée de Bagdad et l’occupation durant plusieurs heures du Parlement.

Les postes clés au gouvernement sont depuis des années partagés sur la base de quotas politiques et confessionnels et Moqtada Sadr, comme M. Abadi souhaite une nouvelle équipe gouvernementale capable d’appliquer les réformes cruciales contre la corruption. Washington a accru ces derniers mois son soutien militaire à Bagdad pour aider l’armée à reconquérir les vastes territoires tombés aux mains des jihadistes depuis 2014.

L’EI a perdu plusieurs villes, dont Tikrit et Ramadi, reprises par les forces irakiennes soutenues par les frappes de la coalition internationale sous commandement américain. S’exprimant à la télévision d’Etat, le porte-parole du gouvernement Saad al-Hadithi a affirmé que l’EI n’occupait plus que 14% du territoire irakien. De son côté, le général américain Gary Volesky, de l’état-major de la coalition antijihadistes à Bagdad, a affirmé que l’EI «perdait du terrain tous les jours» en Irak.

Mais les jihadistes conservent des places fortes, dont Mossoul, deuxième ville du pays, et gardent la capacité de frapper à Bagdad ou ailleurs. Lundi, un attentat à la voiture piégée de l’EI a tué 10 personnes à Baqouba au nord-est de la capitale.

Le Quotidien/AFP