Le président indien a donné carte blanche pour punir ceux qui ont aidé à l’attaque terroriste qui a fait 26 morts au Cachemire. La tension monte d’un cran.
Le Premier ministre indien Narendra Modi a donné mardi son feu vert à une opération militaire en représailles à l’attentat meurtrier commis il y a une semaine au Cachemire, dont il impute la responsabilité au Pakistan voisin. Lors d’une réunion à huis clos, M. Modi «a dit aux forces armées qu’elles avaient la liberté de décider des cibles, du moment et du mode de la riposte indienne à l’attaque», a déclaré sous couvert d’anonymat une source gouvernementale.
Devant ses chefs d’état-major, il a «réaffirmé la détermination nationale à porter un coup déterminant au terrorisme et exprimé sa complète confiance dans les capacité des forces armées indiennes» à le faire, a poursuivi cette source. Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres a condamné «fermement» l’attaque contre des touristes qui a fait 26 morts mardi dans la ville touristique de Pahalgam, dans la partie du Cachemire administrée par l’Inde, a fait savoir son porte-parole dans un communiqué. «Les attaques contre des civils sont inacceptables dans n’importe quelles circonstances», a-t-il ajouté, présentant ses condoléances aux familles des victimes prises pour cible par des hommes armés.
Avant même toute revendication, New Delhi a imputé à Islamabad la responsabilité de cette attaque, la plus meurtrière visant des civils dans cette région à majorité musulmane depuis plus de vingt ans. Le Pakistan a aussitôt démenti toute implication et a réclamé une «enquête neutre». Les deux puissances nucléaires sont depuis sur le pied de guerre. Leurs gouvernements ont multiplié les sanctions diplomatiques réciproques et leurs ressortissants ont été priés de quitter le territoire du voisin au plus tard ce mardi.
Depuis plusieurs nuits, des échanges de tirs d’armes légères opposent soldats pakistanais et indiens le long de la «ligne de contrôle» (LoC), la frontière qui sépare le Cachemire entre leurs deux pays. Ces escarmouches n’ont pas fait de victimes, selon l’armée indienne. Le Pakistan n’a pas confirmé les incidents armés survenus dans la nuit de lundi à mardi, mais des habitants côté pakistanais de la LoC ont affirmé avoir entendu des tirs.
Un drone aurait été abattu
Signe des tensions extrêmes dans la région, le Pakistan a de son côté annoncé mardi y avoir «abattu» un drone de surveillance indien, sans préciser la date de cet incident, non confirmé côté indien. Les experts craignent depuis plusieurs jours une riposte militaire de New Delhi, alors que les opinions publiques des deux camps sont chauffées à blanc. En 2019 déjà, après une attaque meurtrière contre ses soldats, l’Inde avait mené un raid aérien sur le sol du Pakistan, qui avait riposté. La Chine, grand acteur régional, a de nouveau appelé mardi ses deux voisins à «la retenue» et à «gérer les différends par le dialogue» afin de «maintenir la paix et la stabilité régionales».
Le Cachemire, à majorité musulmane, a été partagé entre l’Inde et le Pakistan à leur indépendance en 1947. Les deux voisins, qui se sont livrés plusieurs guerres depuis, continuent à réclamer la souveraineté sur l’ensemble du territoire. Depuis 1989, les combats entre une insurrection séparatistes et les quelque 500 000 soldats indiens déployés dans la partie indienne de la région contestée ont fait des dizaines de milliers de morts.
Immédiatement après l’attentat, les forces de sécurité indienne ont lancé une gigantesque traque pour retrouver les auteurs de l’attentat et leurs complices. La police indienne a diffusé le portrait-robot de trois d’entre eux, dont deux ressortissants pakistanais. Elle les accuse de faire partie d’un groupe proche du LeT, le mouvement jihadiste Lashkar-e-Taiba basé au Pakistan, déjà soupçonné des attaques qui avaient fait 166 morts à Bombay en 2008. Près de 2 000 personnes ont déjà été arrêtées ou interrogées dans le cadre de l’enquête menée par l’Agence nationale d’investigation (NIA), a indiqué lundi une source policière. L’armée indienne a procédé à la destruction d’une dizaine de maisons appartenant, selon les autorités, aux suspects, suscitant la colère d’élus locaux et d’une partie de la population qui dénoncent une «punition collective».