Heiko Maas, ministre sortant de la Justice et cible favorite de l’extrême droite, doit être désigné vendredi pour prendre la tête de la diplomatie allemande malgré un certain manque d’expérience en la matière.
Cet élégant responsable politique social-démocrate de 51 ans, chouchou des magazines de mode, s’apprête à succéder à Sigmar Gabriel à la tête de ce prestigieux ministère dont l’influence est toutefois moindre en période de « grande coalition » entre le centre-gauche et le centre-droite. C’est en effet la chancelière conservatrice Angela Merkel qui continuera de fixer l’orientation de la politique extérieure allemande.
Néanmoins, avant même la désignation officielle de Maas, Gabriel s’est dit convaincu que son successeur fera son travail « d’excellente manière ». Originaire de Sarrelouis, ville adossée à la frontière française, Heiko Maas a participé de près aux âpres et longues négociations entre son Parti social-démocrate (SPD) et les conservateurs pour former leur nouvelle alliance gouvernementale, six mois après les législatives du 24 septembre.
Peu connu en Europe et a fortiori des cercles diplomatiques, Heiko Maas s’est néanmoins distingué par des positions franches durant ses quatre années au ministère de la Justice (2013-2017). Il n’a pas hésité à attaquer de front le parti d’extrême droite en pleine ascension, l’Alternative pour l’Allemagne (AfD), qu’il compare aux néo-nazis ou à tancer le président turc et ses purges post-putsch. Au ministère de la Justice, il imprime sa marque en faisant passer une loi réprimant les propos haineux sur les réseaux sociaux et qui est l’une des plus restrictives d’Europe. Pour l’extrême droite, il est le censeur au service de l’élite politique allemande. Le bilan apparaît néanmoins mitigé puisque le texte va être évalué après avoir essuyé une pluie de critiques, à gauche comme à droite.
Longtemps considéré comme le « perdant notoire »
Réagissant à sa probable nomination, l’AfD, cinglante, a lâché jeudi : « personne mieux que Heiko Maas ne peut représenter aussi bien l’état pitoyable de notre pays », le qualifiant aussi de « ministre de la censure ». L’un des leaders du mouvement islamophobe Pegida l’a comparé par le passé à Joseph Goebbels, ministre de la Propagande d’Adolf Hitler. Heiko Maas est aussi régulièrement insulté, voire menacé, sur les réseaux sociaux. Il a même confié avoir reçu une balle dans un courrier.
Avant d’être appelé dans le précédent gouvernement Merkel, il a effectué une carrière politique régionale dans le Land de Sarre. Dans ce petit État régional, il n’a pas toujours brillé par ses performances électorales. Trois fois tête de liste, il échoue autant de fois à conquérir la région, ce qui lui vaudra longtemps l’étiquette du « perdant notoire », rappelle la chaîne publique allemande ARD.
Fils de soldat élevé dans la foi catholique, c’est aussi dans les magazines sur papier glacé que Heiko Maas s’est fait connaître, notamment en raison de sa relation avec une actrice de télévision connue. En 2016, le magazine masculin GQ le désigne aussi homme le plus classe d’Allemagne. Le quotidien Süddeutsche Zeitung, tout en louant ses « coupes près du corps, ses lunettes à la mode et sa belle silhouette », apporte toutefois un bémol à cette distinction : « le ministre de la Justice est certes bien habillé, mais seulement en comparaison avec ses collègues responsables politiques ».
Le Quotidien/AFP