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Hausse des prix de l’énergie : la France met en place une « indemnité inflation »


Le Premier ministre français, Jean Castex, a annoncé le déploiement de cette aide. (Photo by Ludovic MARIN / AFP)

Après s’être dans un premier temps adressé aux plus modestes, le gouvernement élargit son coup de pouce au portefeuille des Français avec son « indemnité inflation », même si certains s’inquiètent d’une mesure peu pérenne en cas de hausse durable des prix.

Considérant qu’il « n’y a pas que l’essence » qui augmente, le gouvernement de Jean Castex a préféré, plutôt qu’un chèque aux automobilistes ou une baisse des taxes, cette aide directe de 100 euros, versée en une fois, à plus de 38 millions de personnes : salariés, fonctionnaires, indépendants, mais aussi retraités, certains étudiants, propriétaires de voiture ou non.

Il aurait été « absurde » de baisser les taxes sur les carburants, a déclaré la ministre de la Transition écologique Barbara Pompili depuis Rennes, puisqu’à long terme le changement climatique impose de « faire l’inverse ».

38 millions de bénéficiaires, c’est six fois plus de personnes concernées qu’avec le chèque énergie spécial de 100 euros qui sera versé en décembre à 5,8 millions de ménages parmi les plus modestes.

« Vous avez un bouclier sur le gaz, un plafonnement des prix de l’électricité, cette prime qui doit permettre de faire face à l’urgence. Je crois que bout à bout ça constitue une protection solide contre l’augmentation des prix », a insisté vendredi matin le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire lors d’un déplacement à Briançon.

Simple et lisible

Accusé de privilégier les ménages les plus aisés, l’exécutif « avait fait un effort assez significatif sur le pouvoir d’achat après la crise des gilets jaunes, et craint le décalage entre son discours et les chiffres qui montrent une hausse du pouvoir d’achat, et le ressenti qui n’est pas du tout dans ce sens-là », analyse Mathieu Plane, économiste à l’OFCE.

La hausse des prix de l’énergie est très sensible et ressentie immédiatement, rappelle-t-il. « Par contre, quand vous bénéficiez de la suppression de la taxe d’habitation, vous allez vous en rendre compte simplement au moment où vous auriez dû la payer ».

Selon les calculs des économistes d’Euler Hermes, l’indemnité inflation « soutiendra le pouvoir d’achat moyen des ménages français à hauteur de +0,3 point sur un an ».

Mais elle risque d’avoir des effets « asymétriques » d’un ménage à l’autre, entre ceux qui ont une voiture et les autres, qui en bénéficieront quand même, a expliqué Selin Ozyurt, économiste France chez Euler Hermes.

« On ne peut pas avoir en même temps quelque chose de simple et quelque chose qui soit adapté à la situation de chacun », note Alain Trannoy, professeur à l’École d’économie d’Aix-Marseille, évoquant des surcoûts liés aux carburants vraisemblablement plus élevés que 100 euros pour ceux qui habitent à plus de 30 kilomètres de leur lieu de travail.

Mais pour les retraités et les fonctionnaires, dont les revenus ne sont pas indexés, cela peut compenser une baisse de leur pouvoir d’achat, selon lui. « C’est un choix politique d’être compris, une mesure simple qui peut être mise en place très rapidement », a-t-il estimé auprès de l’AFP.

Pour Mathieu Plane, la mesure manque quand même d’équité, sans prise en compte du foyer fiscal. Il prédit « des situations ubuesques », entre par exemple deux retraités urbains sans voiture qui auront deux fois l’indemnité, et une mère seule avec trois enfants en zone périurbaine ayant beaucoup besoin de sa voiture et qui « n’aura que 100 euros ».

Sans compter un inévitable effet de seuil pour ceux qui gagnent juste au-dessus de 2.000 euros net, et ne toucheront pas l’indemnité.

Si les syndicats ont globalement salué le coup de pouce, une « bouffée d’air frais aux plus bas revenus » pour la CFDT, ils mettent en garde contre une hausse durable des prix et continuent de demander de nouvelles négociations sur les salaires.

La CGT, très critique, a déploré une prime « pas à la hauteur ». « Les seules mesures efficaces sont l’augmentation des salaires, des pensions de retraite et des minimas sociaux », a plaidé le syndicat.

« Sur le long terme, la seule vraie réponse à l’interrogation des Français sur le pouvoir d’achat, c’est le travail, le travail pour tous, le travail bien rémunéré avec plus de dynamique salariale en particulier pour les plus modestes », a d’ailleurs aussi affirmé vendredi, Bruno Le Maire.

Rappelons qu’au Luxembourg, pour faire face à la hausse des prix de l’énergie et de l’inflation, le gouvernement a débloqué le 1er octobre dernier l’indexation des salaires, augmentant ainsi tous les salaires du pays de 2,5%, mais a aussi annoncé une hausse de l’allocation de vie chère, afin d’aider les ménages concernés à compenser la hausse des coûts énergétiques.

Une allocation « d’au moins 200 euros par ménage » est ainsi attendue pour le 1er janvier 2022.

LQ avec AFP