Après le vote houleux de premières réformes, la Grèce pouvait caresser l’espoir jeudi de remplir rapidement ses caisses, et a obtenu une bouffée d’air pour ses banques de la part de la BCE, ralliée à un allègement de la dette.
Dans la foulée d’un vote nocturne du Parlement grec, qui a mis sur les rails des réformes en tant que gage de bonne volonté et au prix de fortes tensions politiques, elle a reçu le soutien appuyé du président de la Banque centrale européenne (BCE) Mario Draghi pour trouver un moyen d’alléger sa dette, une nécessité « indiscutable ».
Un soutien de poids, mais impuissant à enrayer la détérioration de la situation politique en Grèce, où des élections anticipées pourraient « très probablement avoir lieu » d’ici à octobre, a jugé jeudi le ministre de l’Intérieur Nikos Voutsis.
Le Parlement grec, la Vouli, a entériné quatre réformes, dont une hausse de la TVA, conformément aux exigences des créanciers, mais au prix de beaucoup de défections dans les rangs de la formation de gauche radicale Syriza du Premier ministre Alexis Tsipras.
Le vote a en tout cas satisfait les ministres des Finances de la zone euro, qui ont donné leur aval jeudi à l’ouverture de négociations officielles pour un plan d’aide de plus de 80 milliards d’euros, dont le principe avait été approuvé en début de semaine.
Presque plus important encore dans l’immédiat, les 28 pays de l’UE se dirigeaient vers un accord sur un financement relais permettant à la Grèce, exsangue, de toucher de l’argent dans les tout prochains jours pour faire face aux dépenses courantes et à un gros remboursement de 4,2 milliards d’euros à la BCE lundi.
Pour assurer, au moins en partie, ce « pont » financier, la Commission européenne a proposé un prêt de sept milliards d’euros, qui seraient puisés dans un fonds communautaire. Les discussions continuaient toutefois pour « minimiser les risques » des pays de l’UE non membres de la zone euro, selon un tweet du président de l’Eurogroupe Jeroen Dijsselbloem. Londres surtout ne veut pas passer à la caisse pour régler les problèmes du bloc monétaire.
Prenant acte de toutes ces avancées, le conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne (BCE), qui avait à Francfort une réunion ordinaire, a relevé de 900 millions d’euros le plafond des prêts d’urgence ELA, bouée de sauvetage des banques grecques. « Les conditions d’un relèvement d’ELA sont à nouveau réunies », a dit M. Draghi. Le desserrement de la bride pour les banques, fermées depuis le 29 juin, pourrait leur permettre de rouvrir, mais cette décision appartient à la Grèce.
Le Parlement grec doit voter la semaine prochaine d’autres pans des réformes promises, et la BCE devrait gonfler encore un peu plus les volumes d’ELA à chaque avancée de ce type, notait Holger Schmieding, analyste de Berenberg, évoquant « la carotte » tenue par M. Draghi.
Il subsiste néanmoins « des interrogations sur la volonté et la capacité (du gouvernement grec) à mettre en oeuvre » les réformes promises, a reconnu M. Draghi, pour lequel « il sera du ressort du gouvernement grec » de lever ces doutes.
A Athènes M. Tsipras paraissait fragilisé par la perte de sa majorité parlementaire. Evoquant une « déchirure », le quotidien grec libéral Katherimini tablait sur un remaniement ministériel. « Il est évident que le gouvernement de M. Tsipras est désormais un gouvernement minoritaire », soulignait le journal de droite Eleftheros Typos.
Les Européens devraient entrer dans le vif du sujet des négociations sur une troisième aide une fois obtenu vendredi l’aval des députés du Bundestag, la chambre basse du parlement allemand, qui doit mandater son gouvernement pour négocier. Même si la chancelière Angela Merkel fait face à de plus en plus de grogne dans son camp conservateur, le feu vert de l’assemblée est assuré.
En revanche, pour l’Allemagne, la question d’une réduction de la dette de la Grèce, qui atteint 180% du PIB reste particulièrement sensible. Le Fonds monétaire international (FMI) a fait sensation mardi en semblant lier sa participation au prochain programme d’aide à un allègement de la dette grecque par les Européens, qui la détiennent en grande majorité. Cela pourrait passer soit par des allongements de maturité spectaculaires, soit par une réduction pure et simple, une option inenvisageable du point de vue de Berlin.
« Un véritable effacement de la dette est incompatible avec le fait d’appartenir à l’union monétaire », a réaffirmé jeudi le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble.
AFP
Ce que vous appelez une « bouffée d’air », n’est autre qu’un chèque tiré sur les citoyens de l’UE. Merci pour l’air que nos enfants ou petits-enfants auront à rembourser.