Un hommage aux victimes du crash d’un A320 de la compagnie allemande Germanwings, il y a exactement quatre mois dans les Alpes-de-Haute-Provence, a été rendu vendredi au Vernet, en présence de leurs familles et d’habitants de cette région rurale.
La cérémonie œcuménique, présidée par l’évêque de Digne Jean-Philippe Nault, sous une grande tente ouverte, dressée devant la stèle à la mémoire des 150 victimes du crash, a eu lieu en présence de quelque 200 personnes.
Des prières catholiques, mais également juives et musulmanes ont été prononcées dans toutes les langues. Au pied du monument avaient été déposés des bouquets de fleurs et de petits galets portant des inscriptions en signe de souvenir.
A la fin de la cérémonie, qui s’est tenue pour une grande part sous une pluie battante, 149 ballons blancs ont été lâchés dans le ciel du Vernet, où le soleil commençait à percer.
«Nous nous sentons soutenus par le gouvernement français» a expliqué à l’AFP Robert Oliver, qui a perdu son fils de 36 ans dans le crash. Cet Américain a remercié les équipes de sauveteurs qui ont ramassé les corps des «149 victimes répartis en 30.000 morceaux».
C’est la première fois que le couple venait sur le lieu du crash. Sa femme espagnole, Maribella, a précisé n’avoir encore eu «aucune offre d’indemnisation» de la part de Lufthansa, alors que l’évocation de montants d’indemnisation par la compagnie allemande a fait polémique en Allemagne ces dernières semaines.
A l’initiative du maire du Vernet, des villageois dont la vie a été bouleversée par le crash, le 24 mars, avaient été invités.
«Le crash, c’est dramatique», s’est ému Jean-Marcel, un septuagénaire qui a tenu à venir pour «marquer son respect» aux victimes. «Cent cinquante personnes qui perdent la vie dans nos montagnes ça va nous marquer longtemps. L’endroit de l’accident doit rester un endroit respecté. On va se recueillir chaque fois qu’on va y poser les yeux», témoignait un autre habitant peu après.
Relations tendues avec Lufthansa
Les membres des familles présents se sont ensuite rendus, par petits groupes, au cimetière de la commune où ont été inhumés jeudi soir des restes non identifiés de victimes, dans plusieurs coffrets.
«L’inhumation a eu lieu dans la nuit (…) en toute discrétion», a déclaré à l’AFP Bernard Bartolini, maire de Prads-Haute-Bléone, l’une des communes voisines du drame.
«C’est une tombe commune, collective. Pour les familles de victimes, c’est un deuxième enterrement, car elles ont déjà enterré les parties du corps de leur proche, identifiées par ADN. Il n’y a pas d’autre solution que de le faire de manière collective et groupé», a expliqué pour sa part le maire du Vernet, François Balique.
Cent cinquante personnes, dont 72 Allemands et 50 Espagnols, ont péri dans l’accident de l’Airbus de Germanwings, filiale à bas coûts du groupe Lufthansa, qui reliait Barcelone à Düsseldorf.
Selon les enquêteurs, l’appareil a été délibérément précipité au sol par son copilote allemand, Andreas Lubitz, qui avait souffert dans le passé de graves troubles psychologiques.
La cérémonie, vendredi, a eu lieu alors que les relations sont tendues entre la Lufthansa et les proches des victimes, sur la question des indemnisations. Ceux-ci ont décliné l’offre de 25 000 euros par victime proposée par la compagnie, réclamant au moins 100.000 euros, a indiqué le 18 juillet leur avocat, dans une lettre rendue publique en Allemagne.
Conséquence: le patron de Lufthansa, Carsten Spohr, n’était pas présent au Vernet, une absence qu’un porte-parole de la compagnie a justifié par «l’atmosphère tendue», ajoutant que le dirigeant «ne veut pas perturber une cérémonie digne avec cette question».
Le directeur général de Germanwings, Thomas Winkelmann, et la directrice financière de Lufthansa, Simone Menne, devaient en revanche être présents.
A la suite du crash, une information judiciaire contre X pour homicides involontaires a été ouverte et est instruite à Marseille où trois juges d’instruction du pôle accidents collectifs ont été saisis pour déterminer notamment le niveau de connaissance de la compagnie concernant l’état de santé mentale du copilote.
Selon le procureur de la République de Marseille, Brice Robin, les juges d’instruction devront répondre à cette question: «Comment concilier le secret médical avec l’information que devraient avoir l’autorité de contrôle et l’employeur sur l’état de santé particulièrement fragile d’un salarié qui est pilote d’avion et qui a de lourdes responsabilités?»
AFP