Une série de sondages récents donne une nette avance au camp du maintien du Royaume-Uni dans l’Union européenne, offrant un avantage psychologique certain à ceux qui militent pour rester dans le giron européen à quatre semaines du référendum.
Selon une moyenne des six derniers sondages réalisée mercredi par l’institut What UK Think, le camp du «Remain» (rester) est en tête avec 53% des intentions de vote contre 47% pour le vote du «Leave» (partir). Mardi, le quotidien Daily Telegraph constatait, sur la base d’un sondage de l’institut ORB, que même les électeurs conservateurs et âgés, qui il y a deux mois se disaient majoritairement en faveur d’une sortie de l’UE, avaient viré de bord.
«Le camp du maintien continue de renforcer sa position (…) tandis que celui de la sortie recule pour avoir échoué à dissiper les craintes sur les conséquences financières et économiques d’un Brexit», a commenté dans le journal le stratège politique Lynton Crosby, proche du Premier ministre conservateur David Cameron, qui se bat pour un maintien dans l’UE. Une référence au déferlement de mises en garde lancées par le Trésor britannique, la Banque d’Angleterre, le Fonds monétaire international et jusqu’au président américain Barack Obama, qui tous prédisent des lendemains économiques difficiles au pays en cas de sortie de l’UE.
«Les sondages nous donnent systématiquement en tête», s’est félicité cette semaine devant la presse James McGrory, porte-parole de la campagne officielle pour le maintien dans l’UE, «Britain Stronger in Europe». En face, Nigel Farage, le chef du parti europhobe Ukip, rétorque que «la route est encore longue et seul un fou oserait prédire à ce stade l’issue de ce référendum». Cependant, pour John Curtice, professeur à l’université de Strathclyde en Écosse et spécialiste de l’étude des sondages, «la psychologie de la campagne a changé», donnant des ailes au camp du maintien.
«Mobiliser plus que persuader»
Ce qui ne l’empêche pas d’estimer le glissement «plus léger» qu’il n’apparaît et de mettre en garde contre les conclusions hâtives, alors que chacun dans le pays a en tête le souvenir de l’humiliation des instituts de sondages qui avaient tous échoué à prédire la victoire des conservateurs aux législatives en 2015. «Il n’est pas évident que nous ayons atteint un point de bascule», a-t-il ajouté, tandis que James McGrory a lui appelé à «prendre les sondages avec des pincettes».
D’autant que le creusement de l’écart entre les deux camps s’est accompagné d’un changement de méthode de sondage par les instituts: depuis quelques semaines, ils ont réalisé davantage de sondages par téléphone -une méthode qui depuis le départ donne le maintien en tête-, alors qu’auparavant les enquêtes en ligne -qui elles donnent les deux camps au coude à coude- étaient très majoritaires.
L’une des explications avancée par John Curtice est que les sondages par téléphone privilégient des échantillons comprenant davantage de diplômés. Or ces derniers veulent majoritairement rester dans l’UE. Tout comme les jeunes, qui sont «culturellement et économiquement à l’aise avec la mondialisation et l’immigration», un des thèmes centraux de la campagne. Les minorités ethniques aussi se montrent davantage pro-UE malgré les tentatives de séduction des pro-Brexit qui leur promettent d’ouvrir davantage les portes à une immigration venue du sous-continent indien si le pays ferme ses frontières aux Européens.
Mais comme pour les jeunes, le défi sera de les amener à voter. «Nous entrons dans une course à la participation», constate Matthew Goodwin, membre du cercle de réflexion Chatham House, et chaque camp essaie désormais de concentrer ses forces sur la mobilisation des électeurs qui lui sont a priori acquis. «Dans ce référendum, c’est désormais davantage une question de mobilisation que de persuasion».
Le Quotidien/AFP