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Funérailles de Mohamed Ali : dernier round sous les projecteurs


À Louisville ce vendredi 10 juin. (photo AFP)

Après avoir électrisé les foules dans la touffeur des tropiques et fait connaître son nom de l’Afghanistan jusqu’au Zaïre, Mohamed Ali rejoint vendredi le repos éternel d’un cimetière américain, au terme d’un dernier voyage sous les projecteurs.

Le boxeur au pas de danseur et poings d’acier reposera dans la cité où il est né, Louisville, au coeur d’un pays qui l’a vilipendé ou idolâtré suivant les époques.

Ayant grandi en pleine ségrégation raciale dans une ville où des lieux publics lui étaient interdits, c’est en imperator qu’il y fera son dernier tour, empruntant des rues baptisées de l’identité qu’il s’est lui-même choisie en se convertissant à l’islam.

Débutant à 9h30 (15h30 heure du Luxembourg) la procession en son honneur, longue de 30 kilomètres, rassemblera sur les bords des axes routiers des milliers d’anonymes, venus d’aussi loin que l’Afrique ou l’Asie.

Ils verront passer dans un corbillard la dépouille de « The Greatest », pour qui s’est déjà tenue jeudi une grande prière musulmane.

Connu comme « Happy Birthday »

Le convoi funéraire prendra alors la direction du cimetière Cave Hill.

Dans ce vaste espace de verdure est également enterrée Patty Hill, qui a écrit la mélodie de « Happy Birthday to You », une chanson connue dans le monde entier. Comme un dernier clin d’oeil à l’universalité du boxeur de légende.

A un moment de sa vie, Mohamed Ali fut le visage le plus immédiatement reconnaissable de la planète.

L’inhumation, en présence des enfants d’Ali, se fera dans l’intimité absolue. Le comédien Will Smith et l’ancien champion du monde de boxe Lennox Lewis porteront avec d’autres personnes le cercueil.

Will Smith a joué Mohamed Ali dans le film de Michael Mann « Ali » (2001), un rôle qui lui avait valu une nomination à l’Oscar du meilleur acteur.

Vendredi matin, il a été annoncé que Mike Tyson, autre poids lourd qui a marqué la boxe, s’ajouterait aux porteurs.

« Son chagrin était immense, il ne savait pas s’il pourrait tenir sur le plan émotionnel. Mais apparemment hier il a décidé qu’il se devait d’être ici », a expliqué Bob Gunnell, le porte-parole de la famille.

Un « généreux mécène », dont le nom n’a pas été révélé, a promis de couvrir de pétales de roses rouges le chemin final vers la tombe.

Mais, au fait, qui enterre-t-on vendredi à Louisville? Le petit Cassius Clay, révolté par le vol de son vélo ? Le géant des rings, terrassant les poids lourds au fil de « combats du siècle » ? L’opposant obstiné à la guerre du Vietnam ? L’insupportable provocateur exhibant un gorille en plastique pour se moquer de son rival Joe Frazier ? Le poète de la contre-culture qui « vole comme le papillon (et) pique comme l’abeille »? Le militant attiré par la radicalité version Malcom X ? L’humaniste pacifique prônant la tolérance religieuse? Eh bien justement, tout cela dans un même homme.

« Prisonnier de son corps »

C’est dire la tâche qui attendra quelques heures plus tard ceux qui se chargeront de prononcer l’éloge funèbre du personnage, dans une ultime cérémonie d’adieu.

L’ancien président Bill Clinton fera partie des orateurs, ainsi que le comédien Billy Cristal.

Le président turc Recep Tayyip Erdogan, qui a assisté jeudi à la prière devant la dépouille de la vedette planétaire, a décidé d’écourter son séjour. Selon le quotidien « the Hurriyet Daily News », citant des sources du cabinet présidentiel, M. Erdogan aurait été vexé qu’on lui interdise de déposer sur le cercueil du boxeur un morceau de l’étoffe noire qui recouvre la Kaaba, construction cubique au centre de la grande mosquée de La Mecque.

Distribués gratuitement, les 15.500 billets d’accès à cet événement se sont envolés en une demi-heure, développant même un début de marché noir.

Une fois la parenthèse refermée sur cet ultime instant d’hommages publics, Louisville et ses 600.000 habitants retrouveront leur calme et leurs habitudes.

« Mon héros était prisonnier de son corps », confie Fred Dillon, un chauffeur de taxi local, en référence à la maladie de Parkinson qui durant 32 ans a rongé Mohamed Ali. « Maintenant, il peut voler comme un papillon ».

Le Quotidien / AFP