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France : la PMA pour toutes à l’heure de l’adoption définitive


La GPA reste une "ligne rouge infranchissable" en France, a martelé le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti. (photo AFP)

Épilogue de deux années de travaux, émaillées de passes d’armes et manifestations : le Parlement doit adopter définitivement mardi le projet de loi de bioéthique et sa mesure phare d’ouverture de la PMA à toutes les femmes, en vue d’une mise en œuvre dès les prochaines semaines.

Les textes d’application de la loi ont été préparés afin « que des premiers enfants puissent être conçus avant la fin de l’année 2021 », a promis le ministre de la Santé Olivier Véran. L’extension de la procréation médicalement assistée aux couples de femmes et aux femmes célibataires est attendue depuis des années par les associations LGBT notamment. C’est « neuf ans de gestation et un accouchement dans la douleur », selon l’Inter-LGBT.

Évoquée par François Hollande, puis promise par Emmanuel Macron, la première – et probablement seule grande réforme de société du quinquennat – a pris du retard notamment en raison de la crise du Covid, faisant « perdre » des chances de grossesse à certaines, déplorent ces associations.

A l’inverse, la Manif pour tous dénonce « un passage en force » avec le refus « systématique » de « toute modification du projet initial ». Avec d’autres associations et le soutien de l’épiscopat catholique, le mouvement a mobilisé au fil des mois des dizaines de milliers de personnes contre « la PMA sans père ».

Opinion publique favorable

L’Assemblée nationale, qui a le dernier mot, se prononcera lors d’un ultime vote mardi en fin de journée sur ce vaste texte qui prévoit également une délicate réforme de la filiation et de l’accès aux origines, et aborde nombre de sujets complexes comme l’autoconservation des ovocytes ou la recherche sur les cellules souches embryonnaires.

Si les débats ont été âpres, la PMA pour toutes, remboursée par la Sécurité sociale, n’a pas enflammé la société, à l’inverse du mariage gay sous François Hollande. « On a avancé avec méthode, sans bomber le torse sur cette question d’élargissement du droit des femmes », fait valoir la cheffe de file LREM Aurore Bergé, qui rappelle les états généraux de la bioéthique et l’avis notamment du Comité consultatif national d’éthique qui ont préparé le terrain.

Le soutien de l’opinion à l’ouverture de la PMA augmente au fil des années : 67% des Français y sont désormais favorables, selon un récent sondage Ifop pour l’association des familles homoparentales.

« Mélange des genres » pour l’opposition

Le projet de loi a entamé son parcours parlementaire à l’automne 2019. Dans un premier temps, le Sénat dominé par la droite l’avait voté avec sa mesure d’élargissement de la PMA, excluant toutefois la prise en charge par la Sécurité sociale. Mais en deuxième lecture, les sénateurs ont adopté dans la confusion le texte amputé de cette mesure emblématique. Députés et sénateurs n’ont ensuite pas trouvé de compromis.

Lors d’un ultime examen jeudi, les sénateurs ont rejeté d’emblée le projet de loi, la rapporteure Muriel Jourda (LR) déplorant à nouveau un « mélange des genres » entre des dispositions « qui relèvent de la bioéthique et d’autres dispositions qui sont sociétales ». La PMA a « clivé nos débats » et « le gouvernement a créé les conditions de l’échec », a abondé Bernard Jomier (groupe PS), co-rapporteur.

En remettant le sujet à l’ordre du jour ces derniers mois, « l’exécutif fait preuve d’une absence catastrophique de sens des priorités » face à la crise sanitaire, pointent des piliers de la droite, suggérant plutôt « un vrai débat démocratique en 2022 ». Selon eux, la PMA pour toutes les femmes va inéluctablement conduire à la gestation pour autrui (GPA c’est-à-dire par mère porteuse) au nom de l’égalité, en faveur des hommes.

Le projet de loi permet de reconnaître sous conditions la filiation des enfants nés de GPA à l’étranger, cependant qu’en France elle reste une « ligne rouge infranchissable », a martelé le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti.

LQ/AFP