La justice française a jugé vendredi Cédric Jubillar coupable du meurtre de son épouse Delphine et l’a condamné à 30 ans de réclusion criminelle, à l’issue d’un procès hors normes très médiatisé.
Le peintre-plaquiste de 38 ans a regardé impassible la présidente énoncer la décision, mains serrées sur l’ouverture vitrée du box. Le verdict est conforme aux réquisitions du ministère public.
Les avocats de Cédric Jubillar ont annoncé leur intention de faire appel de cette condamnation. Un nouveau procès devrait se tenir en 2026, probablement devant la cour d’appel de Toulouse, dans le sud-ouest de la France.
Dans la matinée, pour sa dernière prise de parole, l’accusé avait une nouvelle fois assuré n’avoir « absolument rien fait à Delphine », infirmière disparue en décembre 2020 dans le sud-ouest de la France, à 33 ans. Son corps n’a jamais été retrouvé.
Après quatre semaines de procès, la cour, composée de trois magistrats et de six jurés populaires, a délibéré pendant près de cinq heures, pour répondre à la question : Cédric Jubillar « est-il coupable d’avoir, dans la nuit du 15 au 16 décembre 2020 à Cagnac-les-Mines donné volontairement la mort à Delphine Aussaguel épouse Jubillar? ».
Pour prononcer une condamnation, au moins sept des neuf membres du jury devaient le déclarer coupable.
Semer le doute
Invariablement au cours du procès, l’accusé, stoïque dans son box, mais régulièrement secoué de mouvements nerveux, a martelé qu’il n’avait rien à voir avec la disparition de la mère de ses deux enfants.
« Je conteste toujours les faits qui me sont reprochés », a-t-il dit dès sa première prise de parole le 22 septembre, au premier jour du procès de quatre semaines. Et il n’aura pas dévié jusqu’à vendredi matin.
Lors de leurs plaidoiries, jeudi, ses avocats ont cherché à semer le doute dans l’esprit des jurés.
Alors que parties civiles et avocats généraux ont estimé qu’un « pétage de plomb » de l’accusé a pu conduire au meurtre de l’infirmière, Emmanuelle Franck a affirmé: « Un pétage de plomb, c’est ce qu’on appelle un crime pulsionnel, un crime passionnel, celui qui laisse le plus de traces, parce qu’on ne contrôle rien, on éclabousse tout ».
Or, il n’y a aucune trace, a insisté l’avocate, adressant ses dernières salves aux enquêteurs et aux juges d’instruction.
« Vous ne serez pas le jury du festival de Cannes qui vient récompenser le meilleur scénario », a lancé aux jurés son confrère Alexandre Martin. Faute de preuves, les enquêteurs ont, selon lui, imaginé « un faisceau d’indices » et bâti un scénario, qui vient conclure une instruction « à charge ».
« Littérature »
« La conviction des gendarmes dès le premier jour » a empêché la manifestation de la vérité et le procès, quatre ans et demi plus tard, n’a fait que dérouler un « tapis rouge à l’erreur judiciaire », a plaidé Me Martin.
Les deux avocats toulousains défendent Cédric Jubillar depuis son inculpation et son placement en détention en juin 2021.
Pour les parties civiles et l’accusation, la culpabilité de l’accusé ne faisait en revanche aucun doute.
L’avocat général Pierre Aurignac a estimé que « pour défendre l’idée de l’innocence de Jubillar, il faut écarter quatre experts, faire taire 19 témoins et tuer le chien pisteur » qui a établi que la mère de famille n’a pas quitté son domicile la nuit de la disparition.
« Le crime parfait attendra, a-t-il ajouté, le crime parfait, ce n’est pas le crime sans cadavre, mais celui pour lequel on n’est pas condamné, et vous allez être condamné M. Jubillar ».
Pour Me Laurent Boguet, avocat des enfants du couple, « il ne l’a pas seulement tuée, il l’a étranglée pour la faire taire, il l’a effacée en faisant disparaître le corps ».
Vendredi matin, Me Philippe Pressecq, avocat d’une cousine de Delphine, a regretté « le fait qu’il n’y ait pas eu d’aveux ». « Cela va aggraver sa peine », a-t-elle estimé.
« A 22 h 30, elle était dans la maison, à 4 h du matin elle n’y était plus et on sait qu’elle n’est pas sortie de la maison. Le dossier se résume à ça. Tout le reste n’est que littérature », a-t-il dit.