Les forces rebelles ont affirmé mardi avoir lancé une nouvelle offensive dans la région éthiopienne du Tigré, deux semaines après la reprise de la capitale régionale Mekele qui avait conduit le gouvernement à déclarer un cessez-le-feu.
Cette région de l’extrême nord de l’Éthiopie est en proie depuis huit mois à une guerre marquée par des atrocités et par le spectre grandissant de la famine.
« Hier, nous avons lancé une offensive dans la région de Raya et nous sommes parvenus à mettre en déroute les divisions des forces de défense fédérales et des forces amhara », a affirmé Getachew Reda, un porte-parole des rebelles. « Nous sommes parvenus à sécuriser la majorité du sud du Tigré », a-t-il ajouté, précisant contrôler notamment Alamata, principale ville de cette zone et où il affirme se trouver. L’armée fédérale n’était pas joignable pour vérifier ces affirmations, les réseaux de communication étant pratiquement coupés dans la région.
Territoires contestés
Le Premier ministre Abiy Ahmed a lancé le 4 novembre une opération militaire au Tigré pour chasser et désarmer les autorités locales, issues du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF). Fin novembre, le gouvernement, épaulé dans ce conflit par des troupes venues de l’Érythrée voisine et de la région de l’Amhara, qui borde le Tigré au Sud, a pris la capitale régionale Mekele et proclamé la victoire. Mais les combats se sont poursuivis.
Fin juin, l’armée s’est retirée face à une spectaculaire avancée des troupes pro-TPLF, qui ont repris le 28 Mekele, située à l’est, ainsi qu’une majorité du Tigré les jours suivants. Dans la foulée, Addis Abeba a déclaré un cessez-le-feu et retiré l’armée. D’abord qualifié de « blague » par les forces tigréennes, nommées Forces de Défense du Tigré (TDF), le principe de ce cessez-le-feu a ensuite été accepté mais sous conditions. Parmi elles figuraient le retour des forces amhara et érythréennes « à leurs territoires d’avant-guerre ». Les Amhara contrôlaient jusqu’ici les zones sud et ouest du Tigré, qu’ils revendiquent de longue date.
« Nous avons promis de libérer chaque centimètre carré du Tigré », a ajouté Getachew Reda, affirmant que les TDF étaient toujours « aux trousses » des forces pro-gouvernementales dans le sud. À l’ouest, zone située aux confins de l’Éthiopie, de l’Érythrée et du Soudan, des combats sont en cours, a-t-il également dit.
Mardi matin, une source onusienne a fait état de tirs d’artillerie près d’Emba Madre, une localité de l’ouest, tandis que des combats étaient signalés à une quinzaine de kilomètres de là, près de Mai Tsebri. Au sud de la région, des travailleurs humanitaires ont dit entendre des tirs d’armes automatiques près d’un camp de réfugiés, à Mai Aini.
Immenses besoins humanitaires
Cette nouvelle offensive intervient deux jours après l’annonce, samedi, des résultats des élections parlementaires du 21 juin, où le Parti de la prospérité d’Abiy Ahmed a remporté une victoire écrasante. Lauréat du prix Nobel de la paix en 2019, le Premier ministre, qui se présentait pour la première fois devant les électeurs depuis sa nomination en 2018, souhaitait obtenir l’onction populaire qui lui faisait défaut en cette période délicate.
Des violences ethniques touchent plusieurs zones de l’Éthiopie et le sanglant conflit au Tigré a fait des milliers de morts et des millions de déplacés, ternissant son image de jeune dirigeant réformateur. Selon l’ONU, plus de 400 000 personnes ont « franchi le seuil de la famine » au Tigré mais l’aide humanitaire peine à accéder à la région.
Lundi soir, le Programme alimentaire mondial a annoncé dans un communiqué qu’un convoi de 50 camions était arrivé à Mekele, transportant 900 tonnes de nourriture et des équipements d’urgence. Mais cet organe de l’ONU affirme que « le double de ce nombre de camions doit arriver chaque jour au Tigré pour répondre aux immenses besoins humanitaires dans la région ».
LQ/AFP