La Cour suprême des États-Unis se penche lundi sur le cas d’un condamné à mort dont le retard intellectuel a été reconnu par la justice fédérale mais pas par celle de l’État, qui fait souvent autorité en matière de peine capitale.
La Cour suprême pourrait supprimer la prépondérance de la justice des États sur la justice fédérale après une condamnation à mort. (Photo illustration AFP)
Au cœur de cette affaire, la législation américaine sur la peine de mort, qui établit qu’un tribunal fédéral peut arrêter une exécution à la seule condition que le tribunal d’État a été « déraisonnable » en considérant les faits.
Dans le couloir de la mort de Louisiane (sud), Kevan Brumfield a été condamné au châtiment suprême pour le meurtre d’un policier en 1993. Même si ses déficiences intellectuelles avaient été évoquées au procès, la loi n’interdisait pas à l’époque l’exécution des personnes retardées mentalement.
En 2002, la Cour suprême a jugé, dans l’arrêt Atkins v. Virginia, que le Huitième Amendement de la Constitution proscrit l’exécution en cas de handicap intellectuel. Le nouvel avocat de Brumfield a alors demandé une audience et le financement d’une expertise pour prouver son retard mental. Mais le tribunal de Louisiane lui a refusé cette possibilité au motif que son QI de 75 était légèrement supérieur à la limite fixée par la Cour suprême pour établir le retard intellectuel (70).
Le tribunal fédéral lui a en revanche accordé cette audience, puis, sur la base de nouvelles expertises, a établi que le condamné était « handicapé intellectuel et donc inapte pour l’exécution ». En appel, ce jugement a été cassé par une cour fédérale par « déférence » pour la justice de l’État.
Au-delà de ce cas, l’affaire est potentiellement historique si la Cour suprême supprime la prépondérance de la justice des États sur la justice fédérale après une condamnation à mort. Elle va « remplir les vides qu’elle a laissés » sur le retard mental et la peine capitale, prévoit l’expert Steven Schwinn. Elle peut ainsi décider que la justice locale a été « déraisonnable » avec Brumfield et n’est donc plus « habilitée à la déférence » de la justice fédérale, a commenté l’avocat Amir Ali, qui plaidera pour le prisonnier devant la haute Cour.
« Aujourd’hui, nous savons quelque chose de très important : Kevan ne remplit pas les critères pour être exécuté. Si (la Cour suprême) ne trouve pas que le juge d’État a été déraisonnable, elle ne regarde pas les choses en face », a estimé Nicholas Trenticosta, l’avocat qui l’a défendu ces dernières années devant les tribunaux.
« Alors que la peine de mort et les exécutions déclinent à travers le pays, il est de plus en plus important que de vieux cas comme celui de M. Brumfield soient examinés avec la précision exigée aujourd’hui », a commenté Rob Dunham, directeur du Centre d’information sur la peine capitale.
AFP