Le suspense demeurait sur l’issue du vote de jeudi au Congrès pour abroger la loi sur la santé de Barack Obama, promesse de campagne emblématique de Donald Trump et premier grand test politique pour le président américain.
La Chambre des représentants, chambre basse du Congrès, doit voter jeudi sur un texte abrogeant et remplaçant « Obamacare », première grande réforme du mandat du 45e président des Etats-Unis, qui se targue d’être un négociateur hors pair. Les opposants conservateurs assurent avoir assez de voix pour couler la proposition de loi, mais les chefs républicains continuaient leurs marchandages pour les convaincre de rester solidaires de la majorité.
Le principe est d’abroger et de remplacer « Obamacare », la réforme emblématique de la couverture maladie de Barack Obama. Comment cette loi changerait-elle le système de santé américain?
La couverture maladie
Aux Etats-Unis, la couverture maladie est principalement un marché privé. La moitié environ des Américains ont une couverture souscrite par leurs employeurs, selon la Kaiser Family Foundation, souvent à un coût abordable, auprès d’assureurs privés. Seul un peu plus d’un tiers des Américains bénéficient d’une couverture publique, réservée aux plus vulnérables (programme Medicaid) et aux plus de 65 ans (Medicare).
Le reste est soit sans assurance, soit assuré individuellement auprès d’assureurs privés, par exemple des travailleurs indépendants ou des salariés de petites entreprises. Pour ces individus, le coût peut être très élevé, jusqu’à plusieurs milliers de dollars par mois pour une famille.
Les apports d’Obamacare
En 2010, Barack Obama et ses alliés démocrates ont adopté une grande réforme destinée à réduire le nombre de personnes vivant sans couverture maladie, qui représentaient alors 16% de la population.
La loi, surnommée « Obamacare », a élargi les conditions d’accès au programme public Medicaid, et a créé des aides financières, sous la forme de crédits d’impôts, pour aider les gens à payer leur assurance privée sur de nouveaux marchés individuels. En échange, la loi a imposé une amende à toute personne n’étant pas assurée.
Autres nouveautés, pour tout le monde: les enfants peuvent désormais rester sur l’assurance de leurs parents jusqu’à 26 ans et les assureurs ne peuvent plus refuser d’assurer quelqu’un à cause de ses antécédents médicaux, comme une maladie chronique ou un cancer. Ces deux acquis, très populaires, sont conservés par les républicains dans leur projet de réforme.
Le résultat d’Obamacare est positif pour le taux de personnes sans assurance, tombé à moins de 9% en 2016 selon l’administration précédente. Mais la facture pour le contribuable est lourde, et le prix des assurances individuelles a bondi dans de nombreux Etats, car ce marché individuel s’est révélé moins rentable que prévu.
Les républicains dénoncent depuis des années la lourdeur et le coût de la loi, craignant une socialisation de la médecine.
La réforme républicaine
La philosophie de la réforme républicaine est de désengager l’Etat fédéral, de libérer le marché, de supprimer l’obligation individuelle de s’assurer en échange d’incitations, et d’abroger un certain nombre de taxes créées par Obamacare.
Mais les républicains sont confrontés à un défi de taille: comment faire en sorte que des gens ne perdent pas leur couverture?
Par compromis, ils ont gardé l’idée des crédits d’impôts pour aider une partie de la population à s’assurer. Mais les montants sont moins généreux qu’actuellement, surtout pour les Américains âgés qui n’ont pas encore droit à Medicare.
Et ils veulent réduire la voilure de Medicaid en plafonnant les montants déboursés par l’Etat fédéral, au grand dam d’un certain nombre d’Etats, qui cogèrent le programme public.
Conséquence: selon un rapport du Bureau du budget du Congrès (CBO) sur la première version de la réforme, 14 millions de personnes devraient perdre leur couverture en 2018 par rapport au statu quo, et 24 millions à l’horizon 2026, effaçant le gros des acquis d’Obamacare.
Le texte a toutefois été remanié cette semaine et pourrait légèrement changer ces prévisions.
La majorité désunie
L’opposition démocrate du Congrès devrait voter contre la réforme, ce qui force la majorité républicaine à être unie pour faire adopter le plan.
Mais l’aile conservatrice a surnommé la proposition de loi d' »Obamacare light » et tente de négocier, obtenant quelques concessions dans la version amendée qui sera soumise au vote jeudi.
Ces parlementaires conservateurs estiment que leurs principes ne sont pas respectés puisque les crédits d’impôts ne sont pas complètement supprimés, et que l’Etat fédéral continue à subventionner une partie du système de santé.
L’aile modérée des républicains s’inquiète à l’inverse d’une réforme idéologique qui priverait des millions d’Américains de couverture et fera augmenter la facture à des millions d’autres.
Si le texte est adopté par la Chambre des représentants jeudi, le Sénat l’examinera la semaine prochaine, avec de nouveaux amendements en perspective.
Le Quotidien /AFP