Les Américains éliront dans un an le successeur de Barack Obama. Clinton, Trump, Carson, Bush… Rarement la course à la Maison Blanche aura été aussi ouverte, entre un parti démocrate visant un triplé historique et un parti républicain en crise identitaire.
Aucun sujet de campagne ne s’impose, ni le «terrorisme» comme en 2004, ni l’économie comme en 2008. Les candidats débattent de la guerre en Syrie, de la menace russe, de liberté de religion, des armes à feu, du sort des clandestins, de l’inégalité des richesses, des tensions entre Noirs et policiers…
Chez les démocrates, trois candidats officiellement, et deux en réalité, se disputent l’investiture présidentielle: l’ex-secrétaire d’Etat Hillary Clinton, 68 ans, et le sénateur Bernie Sanders, 74 ans.
Hillary Clinton, bien que sa popularité ait baissé sous le coup de controverses sur ses courriels et sa prestation de chef de la diplomatie, reste la préférée des électeurs démocrates en vue des primaires. Plus de la moitié la soutiennent.
Malgré les dos d’âne, le bulldozer Clinton poursuit donc sa route, les caisses pleines. Le processus des primaires commencera le 1er février 2016 dans le petit Etat rural de l’Iowa (centre) et se poursuivra dans chaque Etat jusqu’en juin.
Chez les républicains, 14 hommes et une femme sont candidats aux primaires du parti.
Dopé par une couverture médiatique permanente, le milliardaire Donald Trump, 69 ans, a dominé les sondages parmi les républicains depuis juillet. Mais depuis quelques jours, le neurochirurgien noir à la retraite Ben Carson, 64 ans, le rattrape. A eux deux, ils recueillent la moitié des intentions de vote des républicains.
Une douzaine de candidats dits traditionnels, sénateurs et gouverneurs, se partagent l’autre moitié, comme les sénateurs Marco Rubio (Floride) et Ted Cruz (Texas), ou l’ex-gouverneur de Floride Jeb Bush, héritier de la dynastie Bush, qui est tombé à la cinquième place dans les sondages des primaires et tente de persuader ses soutiens qu’il n’est pas sous perfusion.
«Il y a toujours eu une portion de l’électorat attirée par les outsiders», tempère Brian McClung, un consultant républicain. «Haïr les politiciens de Washington est une vieille tradition américaine».
La différence, cette année, est que la vague anti-establishment qui porte Trump et Carson ne donne aucun signe d’épuisement, créant la panique chez les cadres du parti, persuadés que l’investiture d’un Trump serait la garantie d’une défaite à la présidentielle.
«Trop tôt» pour savoir
Après la défaite de 2012, le parti républicain avait promis la rénovation, passant par une ouverture aux minorités, notamment hispaniques, qui avaient majoritairement voté démocrate.
Ce nouveau départ ne s’est pas matérialisé. Les républicains ont rejeté d’une même voix un projet de réforme migratoire et de régularisation de sans-papiers soutenu par les démocrates. Les sorties anti-immigrés de Donald Trump rebutent les électeurs hispaniques.
Mais les sondages, s’ils donnent une idée de l’humeur du parti aujourd’hui, sont de peu d’utilité pour prédire les résultats des primaires, qui ne commenceront que dans trois mois – une éternité. «Il est absolument trop tôt pour dire que Trump ou Carson sont les favoris», dit Brendan Nyhan, professeur au Dartmouth College, à l’AFP.
Selon lui, les électeurs se décideront principalement sur la personnalité des candidats et leur capacité perçue à battre Hillary Clinton dans les urnes – un critère fluctuant jusqu’à la dernière minute.
Rappel utile: en 2008 et 2012, à la même époque, Hillary Clinton, l’ancien maire républicain de New York Rudy Giuliani et l’ancien patron d’une chaîne de pizzerias Herman Cain, également républicain, menaient dans les sondages de leurs partis… Et cette volatilité durera jusqu’aux primaires, assure l’expert.
Après tout, en 1992, Bill Clinton avait perdu les cinq premières primaires démocrates avant de devenir le «come back kid».
Quant aux sondages pour la présidentielle elle-même, en novembre 2016, portant sur un éventuel match Clinton-Trump ou Clinton-Carson, mieux faut les ignorer, prévient Christopher Wlezien, professeur à l’Université du Texas à Austin.
Il a étudié des milliers de sondages réalisés durant l’année précédant chaque présidentielle depuis 1952, concluant que c’est seulement environ 200 jours avant l’élection que les préférences des électeurs commencent à se fixer. «En début d’année, on ne peut rien savoir», dit-il.
AFP/M.R.