Danser jour et nuit à moitié nus: grâce au carnaval de Rio qui débute vendredi, les Brésiliens oublieront un temps leurs inquiétudes sur la crise économique et le virus Zika, un échauffement avant la grande fête des jeux Olympiques d’août.
Quand le gros roi Momo, symbole de tous les excès et figure tutélaire du carnaval, recevra vendredi midi les clés de la ville des mains du maire, il décrètera «ouvert» le plus grand spectacle à ciel ouvert du monde dont l’apogée sont les deux nuits (dimanche et lundi) de défilés des écoles de samba sur le sambodrome.
Momo ordonnera d’emblée à ses sujets de «s’amuser» pendant les cinq jours de festivités frénétiques dans tous les recoins de la «ville merveilleuse».
Les autorités estiment que cinq millions de personnes – dont plus d’un million de touristes brésiliens et étrangers – danseront la samba, jour et nuit pour certains, et consommeront des milliers de litres de bière glacée pour combattre la chaleur de l’été austral.
Boudé pendant des années en raison de la violence, le carnaval de rue connaît un regain depuis la «pacification» de centaines de favelas en vue de la Coupe du monde de football 2014 et des JO de cette année du 5 au 21 août. Au total, 505 «blocos», ces groupes carnavalesques où l’on défile déguisé ou pas au son des percussions et de la samba, prendront d’assaut les rues dans le seul but de danser, s’amuser et draguer.
Le plus traditionnel «Cordao de Bola Preta» devrait drainer deux millions de personnes samedi matin au centre de Rio.
« Oublier tout ça »
Les fêtards laisseront derrière eux crise et chômage. Première ville d’Amérique du Sud à accueillir les JO, Rio et son industrie pétrolière souffrent de la chute des prix du brut, d’une crise dans la santé publique et de la crainte du virus Zika transmis par un moustique et associé à une explosion de cas de microcéphalies déclarée comme «urgence de santé publique de portée mondiale» par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS).
«Le carnaval c’est pour oublier tout ça et faire tout ce qu’on veut, comme beaucoup d’hommes qui se déguisent en femmes», déclare Teresa Curi, vendeuse de déguisements de 61 ans, dans la traditionnelle zone commerciale judéo-arabe du centre ville.
Les 40 degrés ambiants, dans ces ruelles pavées où retentissent des sambas de carnaval à plein volume et des promesses de remèdes miracles contre l’impuissance, ne découragent pas les retardataires en quête d’un costume pour faire la fête.
Mais «la boutique est presque vide alors que les années précédentes elle était bondée à cette époque», déplore une autre vendeuse de la boutique, Souad Modas, qui vit des 5% de commission sur ses ventes. «Je vendais pour 60 000 réais en déguisements la semaine du carnaval, si j’arrive à 15 000 cette semaine, je serai contente», dit-elle.
Olympiades et hommage au Santos
Non loin de là, dans les ateliers de la Cité de la samba, artisans et couturières peaufinent chars et costumes des 12 grandes écoles de samba qui défileront sur le sambodrome devant 70.000 spectateurs dans l’espoir de décrocher le titre de «championne du carnaval».
Des stars du football comme Neymar, 23 ans, du FC Barcelone, actuellement en démêlés avec la justice pour évasion fiscale, et le roi «Pelé», 75 ans, seront célébrés par l’école Grande Rio, qui consacre son défilé à la ville de Santos et son club de football, où sont nées ces deux vedettes.
L’école Uniao da Ilha a pris pour thème les jeux Olympiques, mais son directeur, Marcio André Mehry de Souza, ne cache pas son dépit de n’avoir obtenu aucun parrainage de la mairie ni du Comité Rio-2016 malgré ce choix. «La situation est difficile depuis quatre ou cinq ans. Mais cette année, ça a été pire parce que tout le monde est en crise et que le prix du matériel a augmenté», déplore-t-il.
AFP/M.R.