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Émeutes en Nouvelle-Calédonie : le gouvernement local lance un appel au calme


(Photo : AFP)

Le gouvernement de Nouvelle-Calédonie a lancé mardi un appel à « la raison et au calme » après les émeutes qui ont dévasté Nouméa la veille pendant l’examen, par l’Assemblée nationale à Paris, d’une révision constitutionnelle décriée par les indépendantistes.

Le représentant de l’État français dans ce territoire d’Océanie, Louis Le Franc, a rapporté mardi « des tirs tendus avec armes de gros calibre, des carabines de grande chasse, sur les gendarmes », tout en précisant devant la presse qu’il n’y avait « pas eu de morts ».

Il a ajouté que des habitants de Nouméa avaient été sortis de leurs habitations avant que leurs « domiciles soient brûlés ». Les faits se sont déroulés « essentiellement sur les quartiers Nord avec des destructions de commerces, de pharmacies et de domiciles », a-t-il indiqué en appelant au calme.

« Nous appelons à la responsabilité de tous les Calédoniens, de nos responsables politiques, institutionnels, coutumiers, religieux, associatifs et familiaux. Nous leur demandons d’utiliser toutes les voies et les moyens à leur disposition pour ramener à la raison et au calme », a écrit le gouvernement local dans un communiqué.

« Toutes les raisons des mécontentements, des frustrations et des colères ne sauraient justifier de mettre à mal ou de détruire ce que le pays a pu construire depuis des décennies et d’hypothéquer l’avenir », a-t-il ajouté.

Les pompiers de Nouméa ont dit avoir reçu près de 1.500 appels dans la nuit de lundi à mardi et être intervenus sur environ 200 feux. Selon un regroupement patronal, une trentaine de commerces, d’usines et d’autres entreprises ont été incendiés.

« Tristesse »

« J’ai un sentiment de tristesse », confie Jean-Franck Jallet, propriétaire d’une entreprise de boucherie sauvée des flammes par les pompiers. « Nous avons 40 salariés, on est passé à côté de la catastrophe. On a cru que le vivre-ensemble était possible, mais ça n’a pas marché, il y a trop de mensonges ».

Mardi, les rues de Nouméa et de sa banlieue sont parsemées de carcasses de voitures incendiées et de restes fumants de pneus et de palettes, selon un correspondant sur place.

Même si la situation est plus calme mardi, de nombreuses barricades restent actives. Dans la banlieue nouméenne, un supermarché, forcé à la voiture-bélier pendant la nuit, continue d’être pillé par la population, a rapporté ce correspondant.

Un couvre-feu a été décrété de mardi 18h à mercredi 06h, a annoncé le représentant de l’État dans ce territoire. En outre, tout rassemblement est interdit dans le grand Nouméa, de même que le port d’armes et la vente d’alcool dans l’ensemble de la Nouvelle-Calédonie, indique le haut-commissariat qui invite les 270.000 habitants du territoire à rester chez eux.

Aéroport fermé

Le gouvernement calédonien a annoncé la fermeture des lycées et collèges jusqu’à nouvel ordre. L’aéroport international est fermé et la compagnie Aircalin a suspendu ses vols pour la journée de mardi.

Le ministre néo-zélandais des Affaires étrangères, Winston Peters, qui devait se rendre à Nouméa cette semaine, a reporté sa visite « pour permettre aux autorités de se concentrer entièrement sur la situation actuelle ».

Les émeutes ont éclaté lundi en marge d’une manifestation indépendantiste contre le texte examiné par les députés, qui vise à élargir le corps électoral pour les élections provinciales.

Conformément à l’article 77 de la Constitution, le corps électoral de ce scrutin est en effet gelé : il se limite essentiellement aux électeurs inscrits sur les listes lors du référendum d’autodétermination de 1998 et à leurs descendants, excluant de facto les résidents arrivés après 1998 et de nombreux natifs.

Un électeur sur cinq est ainsi privé du droit de vote aux élections provinciales, cruciales dans ce territoire où les provinces exercent de nombreuses compétences transférées par l’Etat français.

Pour le ministre français de l’Intérieur et des Outre-mer Gérald Darmanin, qui a porté cette réforme constitutionnelle, cette disposition « n’est plus conforme aux principes de la démocratie » et « mène à l’absurde ».

Deux camps s’opposent : celui des non-indépendantistes, favorables à la réforme, et celui des indépendantistes qui y voient au contraire un passage en force de l’État pour « minoriser encore plus le peuple autochtone kanak », qui représentait 41,2% de la population de l’île lors du recensement de 2019, contre 40,3% dix ans plus tôt.

Au cours d’une séance tendue, Gérald Darmanin a appelé les députés à adopter sans modification la réforme, qui ouvre le scrutin provincial aux résidents installés depuis au moins dix ans sur l’île.

Alors qu’un vote solennel était normalement prévu mardi après-midi, les débats à l’Assemblée nationale n’ont pas pu être menés à leur terme dans la nuit, en raison d’un grand nombre d’amendements déposés notamment par le groupe Insoumis. Le nouveau calendrier sera acté mardi matin.

Après celle du Sénat, l’approbation de l’Assemblée est nécessaire pour faire cheminer ce texte, avant de réunir le Parlement en Congrès pour réviser la Constitution, à une date qui reste à fixer.

Prônant l’apaisement, le président Emmanuel Macron a promis dimanche de ne pas convoquer le Congrès « dans la foulée » du vote de l’Assemblée, selon son entourage, pour « privilégier le dialogue ».

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